"Hors Normes", film d’Olivier Nakache et Éric Toledano

« Petites boîtes très étroites
Petites boîtes faites en ticky-tacky
Petites boîtes, petites boîtes
Petites boîtes toutes pareilles…. »

chantait Graeme Allwright

Et malheur aux boîtes de formes et de formats différents que sont les autistes.
La narration de ce film « Hors Normes » est bien menée, haletante, émouvante, elle remue le spectateur en rappelant, à l’occasion d’une enquête sur l’association « Les voix du salut », qu’abondance de règles, de cadres de fonctionnement, de petites boîtes administratives et médicales aboutit à des paradoxes; ici, en l’occurrence, l’absence de prise en charge des situations d’autisme les plus sérieuses car elles échappent aux cadres préétablis.
 

La réalité n’est jamais univoque bien que nombre de dirigeants nous assènent, afin d’asseoir leur image, qu’il faut la regarder en face.

Ce qui perturbe le bon fonctionnement de la société régie par des lois censées s’imposer à tous* peut être considéré, à l’inverse, comme un échec constructif dans le cas d’un autiste en quête d’autonomie.
« Ce n’est qu' en essayant continuellement qu’on finit par réussir. Ou en d’autres termes, plus ça rate plus on a de chances que ça marche. » affirmait la pensée shadokienne !

Le film commence fort et nous prend aux tripes avec deux situations limites soulignant l’importance du regard des autres. Car tout est affaire de langage, d’expression, celle du regard, celle de la parole, celle du toucher, du contact physique afin de créer une relation entre deux individus. Ce mot individu est important car son étymologie le fait remonter à la notion d’indivisibilité.

Un individu n’est pas noir, blanc, juif, musulman, malade, écolier… mais un être à part entière. Notre société ne doit pas être uniquement composée d’acronymes qui renvoient à des services, des structures auxquels l’humain échappe.

La vie est un bricolage incessant qui fait de nous tous des autodidactes permanents voués à l’innovation.
 

« Hors normes » parce que la norme exclut souvent plus qu’elle ne permet d’accueillir et d’inclure.
Souvenir de ce proviseur de lycée assénant à propos des élèves pourvus d’une « belle intelligence » : « Ils ne sont pas faits pour le système scolaire ! » alors qu’on peut rétorquer « Le système n’est pas fait pour eux » (et doit évoluer).

 

« Hors Normes » est un message d’espoir porté par de remarquables acteurs professionnels ou non. Vincent Cassel vieillit bien, Hélène Vincent est remarquable, tous à leur juste place
Place admirablement chorégraphiée dans le spectacle qui clôt le film. Les mouvements habituellement incontrôlés des jeunes autistes y forment une harmonie esthétique qui autorise un sourire d’espoir.

Le film est inspiré d’une histoire vraie.

 

*Une remarque quant à la formule « Nul n’est censé ignorer la loi ». On la comprend habituellement ainsi « Chacun doit connaître la loi et la respecter », mais n’est-il pas possible de penser, à l’inverse, que la loi se doit d’être accessible à tous ?
« Petites boîtes, petites boîtes… »