Alors que l’époque abreuve nos microsillons neuronaux d’injonctions à regarder la réalité en face, à gérer, à programmer, à s’alarmer citoyens, la poésie de Kuzylarsen et son inspiration libertaire nous font décoller du quotidien pour plonger dans des associations de sons, de mots, d’images entre mondes, entre cultures, entre aperçus.
C’est peut-être dans l’entre deux que se tient la conversation la plus intéressante.
Conversation avec Kuzylarsen
Ton album s’écoute avec grand plaisir parce que c’est de la poésie à l’état pur. D’où te vient cette inspiration ? Et le fait que les textes, la voix et l’instrument, le oud, forment vraiment un univers indissociable?
J‘ai baigné un certain temps dans la culture moyen orientale. J’ai découvert le oud à Tunis, la volonté de découvrir l’univers de cet instrument m’a poussé à voyager dans le monde arabe, partout où il est présent. J’ai donc été influencé par les musiques de ces régions mais pas uniquement. J’ai rencontré des artistes, j’ai parlé poésie. J’ai beaucoup joué avec des Iraniens et j’ai été imprégné de la poésie soufie iranienne, autant que par la culture beatnik, par Brautigan. Ces univers se sont rejoints, d’où sans doute la forme un peu particulière de mes chansons, avec une musique aux inflexions orientales et une écriture qui vient d’ailleurs. Je suis peut-être un peu moins « actuel » par rapport aux chansons du moment.
Peut-être, mais avec une profondeur due aux références à Abou Nawas, à Gainsbourg, à Nina Simone…Chaque auditeur peut aussi voyager dans son propre univers grâce au levier que sont tes chansons. « Belles de nuit » m’a fait penser au livre de Kawabata « Les belles endormies ».
Le voyage est un peu ma vie, je suis allé jusqu’au Japon, en effet, mais je suis toujours revenu à Bruxelles. C’est mon point d’ancrage parce que la ville est particulière. La Belgique est un peu un no man’s land qui fait qu’elle est une plaque tournante, avec des gens qui viennent de partout. C’est la continuation de mes voyages, c’est pour cette raison que j’aime Bruxelles.
Il est possible de voyager sans quitter Bruxelles. De voyager géographiquement, culturellement, dans tes références, au point que tu arrives à placer une shampouineuse dans ta chanson « Mademoiselle Aïcha ».
C’est un double clin d’œil. C’est drôle que tu en parles ; oui, c’est un clin d’œil à l’album de Gainsbourg « L’homme à la tête de chou », que je trouve formidable, et il faut savoir que la femme de Ben Ali, le dictateur tunisien, était une ex shampouineuse…
A eux deux, ils ont shampouiné la Tunisie !
Exactement.
C’est peut-être dans l’entre deux que se tient la conversation la plus intéressante.
Conversation avec Kuzylarsen
Ton album s’écoute avec grand plaisir parce que c’est de la poésie à l’état pur. D’où te vient cette inspiration ? Et le fait que les textes, la voix et l’instrument, le oud, forment vraiment un univers indissociable?
J‘ai baigné un certain temps dans la culture moyen orientale. J’ai découvert le oud à Tunis, la volonté de découvrir l’univers de cet instrument m’a poussé à voyager dans le monde arabe, partout où il est présent. J’ai donc été influencé par les musiques de ces régions mais pas uniquement. J’ai rencontré des artistes, j’ai parlé poésie. J’ai beaucoup joué avec des Iraniens et j’ai été imprégné de la poésie soufie iranienne, autant que par la culture beatnik, par Brautigan. Ces univers se sont rejoints, d’où sans doute la forme un peu particulière de mes chansons, avec une musique aux inflexions orientales et une écriture qui vient d’ailleurs. Je suis peut-être un peu moins « actuel » par rapport aux chansons du moment.
Peut-être, mais avec une profondeur due aux références à Abou Nawas, à Gainsbourg, à Nina Simone…Chaque auditeur peut aussi voyager dans son propre univers grâce au levier que sont tes chansons. « Belles de nuit » m’a fait penser au livre de Kawabata « Les belles endormies ».
Le voyage est un peu ma vie, je suis allé jusqu’au Japon, en effet, mais je suis toujours revenu à Bruxelles. C’est mon point d’ancrage parce que la ville est particulière. La Belgique est un peu un no man’s land qui fait qu’elle est une plaque tournante, avec des gens qui viennent de partout. C’est la continuation de mes voyages, c’est pour cette raison que j’aime Bruxelles.
Il est possible de voyager sans quitter Bruxelles. De voyager géographiquement, culturellement, dans tes références, au point que tu arrives à placer une shampouineuse dans ta chanson « Mademoiselle Aïcha ».
C’est un double clin d’œil. C’est drôle que tu en parles ; oui, c’est un clin d’œil à l’album de Gainsbourg « L’homme à la tête de chou », que je trouve formidable, et il faut savoir que la femme de Ben Ali, le dictateur tunisien, était une ex shampouineuse…
A eux deux, ils ont shampouiné la Tunisie !
Exactement.
Tes chansons incarnent vraiment la poésie par l’écriture, les sonorités, les images, mais aussi par le fait que tu mêles des éléments qui normalement apparaissent comme opposés : le plein/le vide, la vie/la mort, l’amour/la guerre…tu ne les opposes pas.
Comme dans « Danser sur la corniche », on est entre ce vide et ce plein, à la recherche de l’équilibre ; on tente de ne pas basculer, de trouver son chemin, ce qui donne des points de vue à des moments donnés.
Au lieu d’être dans l’argumentation habituelle de la politique, du social, du quotidien, la poésie permet d’approfondir et de relier plutôt que d’opposer.
D’ apaiser un peu. Tu sembles être entré rapidement dans cet univers, mais il faut plus de temps à d’autres qui sont venus nous voir trois ou quatre fois avant d’y entrer pleinement et d’accepter notre projet pour le présenter comme producteurs. Ils ont remarqué que quelque chose se passe dans le public.
Il est peut-être plus difficile d’y entrer parce que c’est notre forme à nous, que nous avons créée et que nous faisons partager. Nous n’avons pas voulu faire « A la manière de ». Le label m’a soutenu dans cette démarche sans concessions qui permet par exemple une introduction musicale dans la chanson que nous avons évoquée « Belles de nuit ». Certains vont adhérer immédiatement alors que d’autres ont besoin de plus de temps pour trouver leurs repères.
Comme dans « Danser sur la corniche », on est entre ce vide et ce plein, à la recherche de l’équilibre ; on tente de ne pas basculer, de trouver son chemin, ce qui donne des points de vue à des moments donnés.
Au lieu d’être dans l’argumentation habituelle de la politique, du social, du quotidien, la poésie permet d’approfondir et de relier plutôt que d’opposer.
D’ apaiser un peu. Tu sembles être entré rapidement dans cet univers, mais il faut plus de temps à d’autres qui sont venus nous voir trois ou quatre fois avant d’y entrer pleinement et d’accepter notre projet pour le présenter comme producteurs. Ils ont remarqué que quelque chose se passe dans le public.
Il est peut-être plus difficile d’y entrer parce que c’est notre forme à nous, que nous avons créée et que nous faisons partager. Nous n’avons pas voulu faire « A la manière de ». Le label m’a soutenu dans cette démarche sans concessions qui permet par exemple une introduction musicale dans la chanson que nous avons évoquée « Belles de nuit ». Certains vont adhérer immédiatement alors que d’autres ont besoin de plus de temps pour trouver leurs repères.
Lorsqu’il y a un côté inédit, on se dit « Tiens, il se passe quelque chose ! »
C’est le but du jeu, il faut que ça vienne comme ça, sans le chercher. S’il y avait autant de formes différentes que d’artistes, on serait ravis.
Le mot jeu est intéressant, les paroles sont très belles et il faut se laisser embarquer par elles plutôt que chercher à les analyser. Il faut lâcher prise pour aller dans ton univers.
Je te remercie grandement d’avoir lâché prise pour me suivre avec Abou Nawas, j’ai aussi beaucoup lu et relu les quatrains d’Omar Khayam. Je les ai même chantés en iranien à une époque où je ne me voyais pas encore sur scène dire mes mots. Je chantais de la poésie dans une langue que personne ne comprenait…
Tu perdais encore plus les auditeurs qu’aujourd’hui ! (rires)
Complètement ! La thématique de cette poésie orientale est l’amour, l’amour du vin, l’amour mystique, l’amour de Dieu (même si Khayam a écrit « Entre Dieu et le vin, je choisirais le vin). C’est ce côté libertaire qui me plaît.
Certains pensent que les poètes sont un peu décalés de la société. On se rend compte que non.
Il s’agit de se mettre, malgré soi ou non, dans des situations où certaines choses nous arrivent, on les vit et on les transmet. Il faut être dans le monde pour les sentir. Ce sont des allers/retours permanents.
C’est le but du jeu, il faut que ça vienne comme ça, sans le chercher. S’il y avait autant de formes différentes que d’artistes, on serait ravis.
Le mot jeu est intéressant, les paroles sont très belles et il faut se laisser embarquer par elles plutôt que chercher à les analyser. Il faut lâcher prise pour aller dans ton univers.
Je te remercie grandement d’avoir lâché prise pour me suivre avec Abou Nawas, j’ai aussi beaucoup lu et relu les quatrains d’Omar Khayam. Je les ai même chantés en iranien à une époque où je ne me voyais pas encore sur scène dire mes mots. Je chantais de la poésie dans une langue que personne ne comprenait…
Tu perdais encore plus les auditeurs qu’aujourd’hui ! (rires)
Complètement ! La thématique de cette poésie orientale est l’amour, l’amour du vin, l’amour mystique, l’amour de Dieu (même si Khayam a écrit « Entre Dieu et le vin, je choisirais le vin). C’est ce côté libertaire qui me plaît.
Certains pensent que les poètes sont un peu décalés de la société. On se rend compte que non.
Il s’agit de se mettre, malgré soi ou non, dans des situations où certaines choses nous arrivent, on les vit et on les transmet. Il faut être dans le monde pour les sentir. Ce sont des allers/retours permanents.
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Morceaux volés aux textes de Kuzylarsen :
« Ta voix de sirène effiloche souvent mes mots
Mais mes lignes et les tiennes ont tissé notre peau… »
« Quand les fêlures lointaines
S’habillent de vitraux
La lumière berce… »
« Sous l’écume cendre… »
« Je pourrais boire un lac
Si tu me faisais signe… »
Berce/perce, signe/cygne….