Art & Yoga au Château d’Annecy

On parle beaucoup de bouger les lignes, de changer de logiciel…on en parle beaucoup, certain(e)s le font !
Comme Caroline Sutter, professeure de Yoga et Lucie Cabanes, responsable de l’art contemporain au Château d’Annecy.
Lucie que nous rencontrons en compagnie d’Anne Le Bellec, chargée de la communication pour les musées d’Annecy

« Art et Yoga » au Château d’Annecy, alors que la séance de yoga précède le moment consacré à l’art.
Nous sommes une structure muséale. L’art est notre élément habituel et le yoga l’élément surprenant. C’est l’art qui invite le yoga à interagir avec sa philosophie, ses objets, son histoire ; d’où la notion artistique qui apparaît en premier .Quant à l’art, il englobe  plusieurs domaines dont l’aspect patrimonial.
   Pour l’instant, nous sommes dans un cycle d’art contemporain, mais à partir de septembre nous proposerons un cycle patrimonial.

Ce qui signifie qu’il y a une évolution, une progression et que les séances ne se font pas au coup par coup, isolément ?
Il s’agit d’une initiation continue à la fois dans le domaine artistique choisi, art contemporain actuellement, domaine patrimonial à partir de septembre et en matière de yoga. Chacune des séances est différente des autres pour s’inscrire dans cette progression. Mais il est aussi possible de ne venir qu’une seule fois, pour découvrir, par exemple. Parmi les gens que nous avons déjà eus, certains n’étaient initialement attirés ni par l’art, ni par le yoga mais par le mélange des deux. Il y a beaucoup de modes en matière d’art ou de yoga mais l’association que nous proposons est originale.

   Ce n’était peut-être pas évident au départ (Lucie Cabanes). Je me suis essayée par le passé au yoga sans succès mais la rencontre avec Caroline a favorisé la rencontre entre disciplines. Il y a un respect réciproque dans la manière dont nous menons notre travail, favorisé par le fait que Caroline a une formation en histoire de l’art. C’est d’ailleurs elle qui nous a sollicitées. Sa démarche nous a permis de nous interroger sur nos pratiques et a correspondu avec l’arrivée de notre nouveau directeur, favorable à tout ce qui peut ouvrir à un nouveau public grâce à la rencontre entre les disciplines.
   Une séance test nous a permis de bien calibrer, de voir si nous ne trahissions pas nos matières, si nous ne les tordions pas pour les faire entrer dans ce format.

   Le yoga s’appuie sur des textes fondateurs et quand j’effectue des recherches pour l’art, cela me mène vers eux…le lien est naturel. Je m’intéresse aux mythologies, aux religions, aux différentes cultures, religieuses ou païennes.

Vous utilisez des passerelles qui existent déjà.
"La formation est co-construite par Lucie et Caroline , précise Anne Le Bellec afin de proposer des séances cohérentes autour de thèmes communs." Il y a une sorte de jubilation intellectuelle qui se met au service de la création ; une sorte de défi, aussi, parce qu’il faut trouver la bonne approche, le bon prisme qui permet de rapprocher les deux disciplines sans les trahir. Une œuvre ne livre pas un seul sens mais permet une polyphonie. C’est cette possibilité plurielle qui fait de l’objet une œuvre, possibilité dont les ancrages peuvent se trouver dans les textes fondateurs.

On peut presque dire qu’assouplir les corps permet d’ouvrir l’esprit ?
Nos sociétés vont vite, le yoga permet un ralentissement et un réancrage en soi, de poser l’esprit. Il y a aussi une dimension philosophique, spirituelle à laquelle veille Caroline qui propose des images sans les imposer. Je prends le relais en m’appuyant dessus.
   Les gens sont alors très détendus, alors qu’habituellement les gens abordent l’art contemporain avec des a priori négatifs, parfois de la colère, de barrières…

On revient à une approche globale qui réunit le corps et l’esprit, une sorte d’anti rationalisme à la Descartes.
C’est une démarche de réconciliation entre les deux, que demande l’art contemporain. Marcel Duchamp, le « pape de l’art contemporain » philosophiquement parlant, disait que c’est le regardeur qui fait l’œuvre. C’est pourquoi un engagement est nécessaire. On s’engage en art comme on s’engage en société pour profiter pleinement de ce qu’on est en train de voir. Dans un musée, on ne peut pas tout voir, il faut choisir. Il faut donc se faire confiance, abandonner certaines barrières. Le yoga permet cette disposition d’esprit, cette ouverture.

Les séances sont ouvertes à tout public, des femmes, des hommes, des familles, des adolescents et nous avons pu constater qu’elles apportent à chacun(e).

Le cadre doit jouer un rôle, lui aussi.
Oui, la grande salle du château pour la séance de yoga, alors que le monument est encore fermé au public. La salle d’apparat ! La lumière du matin.

C’est un moment privilégié. Ce que souhaitent vivre les gens : une expérience culturelle qui ne soit pas que de mode mais qui apporte simplement du sens et de la profondeur.