Du Kongo à Lariboisière… une véritable aventure pour la bonne cause.
Cyril, vous êtes un autodidacte.
J’ai refusé le formatage, ça n’a pas été facile.
Il faut une force de caractère. Comment en êtes-vous venu à ce parcours artistique ? Il n’y a pas loin de graffeur à gaffeur.
Graffeur mais gaffeur aussi (rires). Graffeur, c’est plutôt générationnel. Je suis arrivé en France en 75, comme réfugié politique du Vietnam. J’avais six ans. Ma mère est française, mon père vietnamien. Je suis né en France, parti très vite au Vietnam et à mon retour en France je comprenais le français mais je ne le parlais pas très bien. Je me suis rendu compte que je m’exprimais très bien en dessins.
Adolescent, j’ai pris en pleine figure le mouvement hip hop qui mêlait plein de mecs de ma génération, des plus âgés qui s’exprimaient avec des bouts de ficelle. Comme on n’avait pas les moyens d’acheter des instruments de musique, on créait des sons avec des platines. On n’avait pas de salles, alors on dansait sur des cartons avec des mouvements de kung fu, de gymnastique, de capoeira qui donnaient une danse métissée, de combattants, très physique et très athlétique. Des amis écrivaient des vers pour faire claquer les mots en rythme. Quant à moi, je me suis retrouvé tout naturellement à graffer puisque je ne me suis jamais arrêté de dessiner.
Il semblerait que la notion de rythme, que vous évoquez, soit à la base de nombreuses démarches de création.
Le rythme est très important dans ma peinture.
Le chemin d’un autodidacte est difficile parce que c’est à lui de l’inventer en fabriquant ses propres repères mais c’est une formidable liberté.
Je m’en rends compte aujourd’hui. Pendant plus de vingt ans, on a été décriés comme des vandales. On ne comprenait pas notre liberté d’expression alors que, de mon point de vue, c’était un cadeau dans lequel je mettais mon temps, mon énergie et ma peinture. C’est ce que j’expliquais quand j’avais des problèmes avec la justice. Je continue de faire aujourd’hui ce que j’ai toujours fait et qui me valait souvent pour récompenses des gardes à vue et des tentatives de me mettre à l’amende.
Être reconnu a demandé un long chemin qui m’a permis de développer mes travaux un peu plus dans le monde de l’art.
Cyril, vous êtes un autodidacte.
J’ai refusé le formatage, ça n’a pas été facile.
Il faut une force de caractère. Comment en êtes-vous venu à ce parcours artistique ? Il n’y a pas loin de graffeur à gaffeur.
Graffeur mais gaffeur aussi (rires). Graffeur, c’est plutôt générationnel. Je suis arrivé en France en 75, comme réfugié politique du Vietnam. J’avais six ans. Ma mère est française, mon père vietnamien. Je suis né en France, parti très vite au Vietnam et à mon retour en France je comprenais le français mais je ne le parlais pas très bien. Je me suis rendu compte que je m’exprimais très bien en dessins.
Adolescent, j’ai pris en pleine figure le mouvement hip hop qui mêlait plein de mecs de ma génération, des plus âgés qui s’exprimaient avec des bouts de ficelle. Comme on n’avait pas les moyens d’acheter des instruments de musique, on créait des sons avec des platines. On n’avait pas de salles, alors on dansait sur des cartons avec des mouvements de kung fu, de gymnastique, de capoeira qui donnaient une danse métissée, de combattants, très physique et très athlétique. Des amis écrivaient des vers pour faire claquer les mots en rythme. Quant à moi, je me suis retrouvé tout naturellement à graffer puisque je ne me suis jamais arrêté de dessiner.
Il semblerait que la notion de rythme, que vous évoquez, soit à la base de nombreuses démarches de création.
Le rythme est très important dans ma peinture.
Le chemin d’un autodidacte est difficile parce que c’est à lui de l’inventer en fabriquant ses propres repères mais c’est une formidable liberté.
Je m’en rends compte aujourd’hui. Pendant plus de vingt ans, on a été décriés comme des vandales. On ne comprenait pas notre liberté d’expression alors que, de mon point de vue, c’était un cadeau dans lequel je mettais mon temps, mon énergie et ma peinture. C’est ce que j’expliquais quand j’avais des problèmes avec la justice. Je continue de faire aujourd’hui ce que j’ai toujours fait et qui me valait souvent pour récompenses des gardes à vue et des tentatives de me mettre à l’amende.
Être reconnu a demandé un long chemin qui m’a permis de développer mes travaux un peu plus dans le monde de l’art.
Pour beaucoup l’art est ce qui est enfermé dans les murs des musées, vous peignez à l’extérieur, sur les murs.
Oui, mais c’est réducteur. Je me suis rendu compte que la liberté c’est de peindre où tu veux, quand tu veux. Je me suis mis à peindre en atelier, à montrer mes travaux dans des galeries, dans des squats, dans des musées : c’est ça la vraie liberté. Je peins sur un train si j’en ai envie.
Aujourd’hui je prends l’hôpital Lariboisière… quand je dis « Je prends » c’est toujours un échange d’intentions, de bonnes vibrations. J’ai toujours beaucoup de gratitude ; ma peinture est un geste généreux, jamais un vol ou une agression, le graffiti et le street art sont avant tout un cadeau.
Vous semblez garder cette liberté même si vous travaillez avec une grande marque, un grand créateur. C’est un échange.
C’est primordial. Pour la collection Chanel des Métiers d’Art que j’ai réalisée avec notre grand « Kaiser », Karl Lagerfeld m’a proposé de réaliser des toiles. Je lui ai donné mon accord à condition de ne pas travailler dans mon atelier, ce qui aurait fait de moi une main de Chanel en plus. Mon travail est de raconter des histoires ; en tant qu’artiste, j’ai besoin de cristalliser le temps. Karl Lagerfeld m’a proposé de venir réaliser mes œuvres dans son atelier personnel Quai Voltaire. Ça a été un moment sublime, une charnière de ma carrière à la fin de sa vie, tellement enrichissant. Il a duré peu de temps mais j’ai été à grande école.
Dans le temps il y a la durée mais aussi l’intensité ; on revient au rythme, à l’intensité et à l’explosivité.
On peut rester dix ans sur un sujet sans rien comprendre et être complètement dedans en une semaine. Pour être dans l’intensité, il faut cultiver le moment présent.
Oui, mais c’est réducteur. Je me suis rendu compte que la liberté c’est de peindre où tu veux, quand tu veux. Je me suis mis à peindre en atelier, à montrer mes travaux dans des galeries, dans des squats, dans des musées : c’est ça la vraie liberté. Je peins sur un train si j’en ai envie.
Aujourd’hui je prends l’hôpital Lariboisière… quand je dis « Je prends » c’est toujours un échange d’intentions, de bonnes vibrations. J’ai toujours beaucoup de gratitude ; ma peinture est un geste généreux, jamais un vol ou une agression, le graffiti et le street art sont avant tout un cadeau.
Vous semblez garder cette liberté même si vous travaillez avec une grande marque, un grand créateur. C’est un échange.
C’est primordial. Pour la collection Chanel des Métiers d’Art que j’ai réalisée avec notre grand « Kaiser », Karl Lagerfeld m’a proposé de réaliser des toiles. Je lui ai donné mon accord à condition de ne pas travailler dans mon atelier, ce qui aurait fait de moi une main de Chanel en plus. Mon travail est de raconter des histoires ; en tant qu’artiste, j’ai besoin de cristalliser le temps. Karl Lagerfeld m’a proposé de venir réaliser mes œuvres dans son atelier personnel Quai Voltaire. Ça a été un moment sublime, une charnière de ma carrière à la fin de sa vie, tellement enrichissant. Il a duré peu de temps mais j’ai été à grande école.
Dans le temps il y a la durée mais aussi l’intensité ; on revient au rythme, à l’intensité et à l’explosivité.
On peut rester dix ans sur un sujet sans rien comprendre et être complètement dedans en une semaine. Pour être dans l’intensité, il faut cultiver le moment présent.
Il faut le nourrir, être actif, ce qui nous renvoie à la notion de liberté. Les autodidactes sont des gens très curieux, poreux au monde.
C’est mon cas. Je visite plein d’univers différents et je crée des ponts entre eux, l’horlogerie, la joaillerie, la mode, l’aéronautique…
Sans y disparaître. Vous travaillez « avec » Chanel, par exemple, mais pas « pour » Chanel.
C’est très important.
Et ça apporte une forme de reconnaissance à votre travail de la rue qui était méprisé au départ.
Parce qu’on ne le comprenait pas et qu’on ne pouvait pas l’apprivoiser. Finalement, c’est de là que je viens… et je ne suis pas apprivoisable.
À l’hôpital Lariboisière, votre intervention rend visible ce qu’on ne voit pas habituellement, comme le personnel soignant.
J’ai vécu comme une frustration d’applaudir le personnel soignant à 20 heures sans pouvoir le remercier davantage. Je me suis demandé ce que je pourrais faire personnellement pour lui donner un peu de joie et lui exprimer ma gratitude, des agents de sécurité aux professeurs. D’autant plus que ces gens n’avaient ni blouses, ni masques, ni tests.
Le projet a pu aboutir en très peu de temps et je remercie l’hôpital Lariboisière pour sa réactivité, notamment le professeur Patrick Henry.
Nous parlions du temps, de période intense, celle que nous vivons invite à l’ingéniosité, à la réactivité.
Ce sont des moments d’urgence où il faut surpasser la peur. Le confinement fait partie des gestes citoyens mais chacun peut apporter son petit grain de riz pour qu’il forme un grand sac capable de nourrir tout le monde. Chacun peut apporter sa contribution, petite ou grande.
Je vais réaliser une digigraphie de l’œuvre que je réalise ici et en proposer des exemplaires contre des dons. L’ensemble des bénéfices ira à l’hôpital Lariboisière qui en fera ce qu’il voudra.
La véritable réussite est de servir. Si mon art me le permet, je suis comblé.
C’est mon cas. Je visite plein d’univers différents et je crée des ponts entre eux, l’horlogerie, la joaillerie, la mode, l’aéronautique…
Sans y disparaître. Vous travaillez « avec » Chanel, par exemple, mais pas « pour » Chanel.
C’est très important.
Et ça apporte une forme de reconnaissance à votre travail de la rue qui était méprisé au départ.
Parce qu’on ne le comprenait pas et qu’on ne pouvait pas l’apprivoiser. Finalement, c’est de là que je viens… et je ne suis pas apprivoisable.
À l’hôpital Lariboisière, votre intervention rend visible ce qu’on ne voit pas habituellement, comme le personnel soignant.
J’ai vécu comme une frustration d’applaudir le personnel soignant à 20 heures sans pouvoir le remercier davantage. Je me suis demandé ce que je pourrais faire personnellement pour lui donner un peu de joie et lui exprimer ma gratitude, des agents de sécurité aux professeurs. D’autant plus que ces gens n’avaient ni blouses, ni masques, ni tests.
Le projet a pu aboutir en très peu de temps et je remercie l’hôpital Lariboisière pour sa réactivité, notamment le professeur Patrick Henry.
Nous parlions du temps, de période intense, celle que nous vivons invite à l’ingéniosité, à la réactivité.
Ce sont des moments d’urgence où il faut surpasser la peur. Le confinement fait partie des gestes citoyens mais chacun peut apporter son petit grain de riz pour qu’il forme un grand sac capable de nourrir tout le monde. Chacun peut apporter sa contribution, petite ou grande.
Je vais réaliser une digigraphie de l’œuvre que je réalise ici et en proposer des exemplaires contre des dons. L’ensemble des bénéfices ira à l’hôpital Lariboisière qui en fera ce qu’il voudra.
La véritable réussite est de servir. Si mon art me le permet, je suis comblé.
Cyril Kongo en pleine réalisation de son oeuvre à l'hôpital Lariboisiere ©DR
L'œuvre de Cyril Kongo à l'hôpital Lariboisiere rend hommage au personnel soignant ©DR
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