Aqualti étudie les lacs alpins d’altitude pour y relever la présence de microplastiques et travaille en réseau sur le territoire alpin.
Frédéric Gillet, présentez-nous Aqualti.
L’association est née début 2019, notamment pour monter le projet Plastilac de recherche de fibres plastiques dans les lacs d’altitude. Notre objectif est de compléter les données scientifiques sur les microplastiques dans les lacs d’altitude en particulier, en montagne plus généralement, et de sensibiliser le grand public sur la base de ces données. Ce n’est pas de l’écologie punitive ni moralisatrice mais une sensibilisation par l’exemple en montrant que même dans ces sites majestueux, apparemment exempts de pollution, il est possible de retrouver des polluants, en particulier des microplastiques.
Ces microparticules viennent de nos villes, de notre mode de vie, migrent vers les sommets desquels elles risquent de nous revenir ?
Les particules ne vont pas forcément revenir dans nos vallées mais elles risquent de contaminer et de s’accumuler dans les écosystèmes, mêmes les plus éloignés des sources de pollution.
En 2020 la production mondiale de plastique atteint dix tonnes par seconde. Dans les années 60, la production était d’une tonne par seconde, l’accroissement est exponentiel.
Le plastique est partout. On le retrouve dans les pneus de voitures, les vêtements. Une grande partie des déchets plastiques est récupérée, enfouie en décharges ou incinérée, une autre partie se retrouve malheureusement dans les océans et une infime partie peut se retrouver dans l’atmosphère sous forme de poussières qui viennent se redéposer, même sur les zones les plus éloignées des sources d’émission.
Très peu de données scientifiques étaient disponibles sur ce sujet dans nos territoires de montagne.
Notre objectif a donc été de mener des investigations spécifiques au sein du réseau "Lacs Sentinelles", un réseau de 20 lacs alpins situés à plus de 1800 mètres d’altitude, qui font l’objet d’un suivi régulier par la communauté scientifique.
Frédéric Gillet, présentez-nous Aqualti.
L’association est née début 2019, notamment pour monter le projet Plastilac de recherche de fibres plastiques dans les lacs d’altitude. Notre objectif est de compléter les données scientifiques sur les microplastiques dans les lacs d’altitude en particulier, en montagne plus généralement, et de sensibiliser le grand public sur la base de ces données. Ce n’est pas de l’écologie punitive ni moralisatrice mais une sensibilisation par l’exemple en montrant que même dans ces sites majestueux, apparemment exempts de pollution, il est possible de retrouver des polluants, en particulier des microplastiques.
Ces microparticules viennent de nos villes, de notre mode de vie, migrent vers les sommets desquels elles risquent de nous revenir ?
Les particules ne vont pas forcément revenir dans nos vallées mais elles risquent de contaminer et de s’accumuler dans les écosystèmes, mêmes les plus éloignés des sources de pollution.
En 2020 la production mondiale de plastique atteint dix tonnes par seconde. Dans les années 60, la production était d’une tonne par seconde, l’accroissement est exponentiel.
Le plastique est partout. On le retrouve dans les pneus de voitures, les vêtements. Une grande partie des déchets plastiques est récupérée, enfouie en décharges ou incinérée, une autre partie se retrouve malheureusement dans les océans et une infime partie peut se retrouver dans l’atmosphère sous forme de poussières qui viennent se redéposer, même sur les zones les plus éloignées des sources d’émission.
Très peu de données scientifiques étaient disponibles sur ce sujet dans nos territoires de montagne.
Notre objectif a donc été de mener des investigations spécifiques au sein du réseau "Lacs Sentinelles", un réseau de 20 lacs alpins situés à plus de 1800 mètres d’altitude, qui font l’objet d’un suivi régulier par la communauté scientifique.
Vous étudiez aussi les effets de ces micros particules sur la biodiversité ?
Une thèse vient d’être lancée à l’Université Savoie Mont-Blanc pour traiter de ces problématiques.
L’impact du plastique sur les lacs de montagne est plus faible que sur les lacs de plaine comme le lac d’Annecy, du Bourget ou du Léman. En effet ceux-ci ne font pas l’objet d’une pollution directe par le trafic automobile, les fragments de pneus, les déversements sauvages de déchets… Le seuil de détection des particules plastiques utilisé dans nos protocoles en montagne est très fin (50 microns, soit à peu près l’épaisseur d’un cheveu) puisque nous recherchons des particules "aéroportés", dispersées dans l’atmosphère, donc de petites tailles et légères.
La plupart des études réalisées dans les lacs de plaine ou en mer se focalisent sur les particules de plus grosse taille, avec en général un seuil de détection fixé à 300 µm. Ces particules sont généralement issues de la fragmentation de déchets plastiques.
Le projet Plastilac a pour objet la recherche de particules dans les zones les plus éloignées des sources d’émission, via une déposition atmosphérique de celles-ci. Il ne sera toutefois pas possible de déterminer les sources d’émission (trafic routier, industries…) dans le cadre de ce projet.
Si on ne connait pas l’impact de ces particules sur la santé, on peut toutefois affirmer qu’on ne devrait pas retrouver de particules dans ces zones éloignées !
Comment est née cette idée d’aller voir ce qui se passe en altitude ?
Je m’occupais d’une ONG qui travaille en Arctique, notamment au Groenland, au Spitzberg.
Le projet Nanuk ?
Oui, nous allons recueillir des données à bord d’un bateau "passif" depuis 2016 ; comme je suis Haut-Savoyard de souche, passionné de montagne, j’avais envie de monter un projet plus local. Fin 2018, je suis donc retourné voir mes contacts, en particulier Emmanuel Naffrechoux, professeur à l’Université Savoie Mont-Blanc où j’avais fait mes études, pour savoir s’ils étaient prêts à nous suivre sur ce type de projet.
Une dynamique collective s’est ainsi créée avec Aqualti, l’Université Savoie Mont-Blanc, l’Université Paris Est-Créteil, l’association Asters qui est le pilote du réseau Lacs Sentinelles ; il y a eu la rencontre avec les frères Tourreau… nous sommes maintenant une belle équipe, une douzaine de personnes, ingénieurs, chercheurs, plongeurs, très heureux de contribuer à la sensibilisation du public et au recueil de données d’autant plus intéressantes qu’elles sont très peu nombreuses encore à ce jour.
N’oublions pas nos financeurs sans qui ce projet n’aurait jamais vu le jour : la Fondation Eau Neige Glace, très impliquée localement sur le sujet de l’eau, et la Zone Atelier Alpes (CNRS).
Une thèse vient d’être lancée à l’Université Savoie Mont-Blanc pour traiter de ces problématiques.
L’impact du plastique sur les lacs de montagne est plus faible que sur les lacs de plaine comme le lac d’Annecy, du Bourget ou du Léman. En effet ceux-ci ne font pas l’objet d’une pollution directe par le trafic automobile, les fragments de pneus, les déversements sauvages de déchets… Le seuil de détection des particules plastiques utilisé dans nos protocoles en montagne est très fin (50 microns, soit à peu près l’épaisseur d’un cheveu) puisque nous recherchons des particules "aéroportés", dispersées dans l’atmosphère, donc de petites tailles et légères.
La plupart des études réalisées dans les lacs de plaine ou en mer se focalisent sur les particules de plus grosse taille, avec en général un seuil de détection fixé à 300 µm. Ces particules sont généralement issues de la fragmentation de déchets plastiques.
Le projet Plastilac a pour objet la recherche de particules dans les zones les plus éloignées des sources d’émission, via une déposition atmosphérique de celles-ci. Il ne sera toutefois pas possible de déterminer les sources d’émission (trafic routier, industries…) dans le cadre de ce projet.
Si on ne connait pas l’impact de ces particules sur la santé, on peut toutefois affirmer qu’on ne devrait pas retrouver de particules dans ces zones éloignées !
Comment est née cette idée d’aller voir ce qui se passe en altitude ?
Je m’occupais d’une ONG qui travaille en Arctique, notamment au Groenland, au Spitzberg.
Le projet Nanuk ?
Oui, nous allons recueillir des données à bord d’un bateau "passif" depuis 2016 ; comme je suis Haut-Savoyard de souche, passionné de montagne, j’avais envie de monter un projet plus local. Fin 2018, je suis donc retourné voir mes contacts, en particulier Emmanuel Naffrechoux, professeur à l’Université Savoie Mont-Blanc où j’avais fait mes études, pour savoir s’ils étaient prêts à nous suivre sur ce type de projet.
Une dynamique collective s’est ainsi créée avec Aqualti, l’Université Savoie Mont-Blanc, l’Université Paris Est-Créteil, l’association Asters qui est le pilote du réseau Lacs Sentinelles ; il y a eu la rencontre avec les frères Tourreau… nous sommes maintenant une belle équipe, une douzaine de personnes, ingénieurs, chercheurs, plongeurs, très heureux de contribuer à la sensibilisation du public et au recueil de données d’autant plus intéressantes qu’elles sont très peu nombreuses encore à ce jour.
N’oublions pas nos financeurs sans qui ce projet n’aurait jamais vu le jour : la Fondation Eau Neige Glace, très impliquée localement sur le sujet de l’eau, et la Zone Atelier Alpes (CNRS).
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Comment informer le public, justement ?
Une publication scientifique est en cours d’écriture. Sa sortie initialement prévue en mars/avril se trouve repoussée à cause de l’épidémie actuelle.
Sur la base de données validées scientifiquement, nous pouvons communiquer en direction du grand public, notamment au niveau des populations continentales et montagnardes. En effet, la pollution de la Méditerranée nous choque moins que la pollution de notre lac le plus proche !
Travailler en équipe avec Asters et surtout l’Université de Savoie permet de créer des filières d’études et de s’inscrire dans une durée significative pour les recherches, les analyses mais aussi pour la prise de conscience.
Effectivement. Je parlais de cette thèse qui a été financée notamment par l’Agence de l’Eau, et par la Fondation Université de Savoie et qui nous permet d’inscrire le projet Plastilac dans la durée sur une période de 3 ou 4 ans.
Le laboratoire EDYTEM de l’Université de Savoie encadre la thèse en question et engagera toute une série de démarches visant à étudier la pollution plastique non seulement sur les lacs d’altitude mais aussi sur les lacs de plaine comme le lac du Bourget ou celui d’Annecy.
Les données recueillies dans le cadre de ces recherches permettront d’alimenter des réflexions en associant les partenaires locaux, pouvoirs publics, décideurs, gestionnaires d’espaces …
L’ambition est de mettre en place une dynamique de communication pour faire prendre conscience aux gens qu’il convient changer de modèle. On dit souvent que le politique peut agir quand le citoyen est prêt, d’où l’intérêt de sensibiliser le citoyen ! Les produits fabriqués par l’industrie sont souvent liés au comportement des consommateurs. Si ces derniers sont prêts à changer, le monde industriel devra s’adapter lui aussi.
Et puis actuellement les gens comprennent de plus en plus qu’en agissant même un tout petit peu chacun à son niveau on contribue à un changement collectif.
Absolument, chacun peut agir à son niveau mais il est nécessaire d’impulser un changement structurel sur toute la chaine de valeur du plastique : fabriquant de matière plastique vierge, fabriquant d’objets plastiques, utilisateurs, gestionnaires de déchets
Des changements sont en cours, à titre d’exemple les Eaux d’Évian promettent d’utiliser 100% de plastique recyclé pour leurs bouteilles à l’horizon 2025.
Les travaux menés par des scientifiques permettent de peser sur ces grands sujets de société et contribuent à influencer les décideurs et capitaines d’industrie.
Concernant l’énorme production mondiale de plastique (10 tonnes par seconde), presque la moitié de celle-ci est à usage unique. Il ne faut pas partir en guerre contre le plastique mais plutôt réfléchir à son usage. Un certain nombre de secteurs comme l’aéronautique ou la santé ne peuvent pas se passer du plastique. Toutefois réfléchissons au "suremballage", à "l’emballage de fantaisie" et au "tout-jetable" !
C’est un problème dont on parle depuis un certain temps.
D’où l’intérêt de disposer d’informations sérieuses et d’images fortes. Montrer que la pollution plastique atteint même des lieux préservés comme les lacs de montagne, qui représentent une forme de pureté, c’est contribuer à une prise de conscience collective.
Une publication scientifique est en cours d’écriture. Sa sortie initialement prévue en mars/avril se trouve repoussée à cause de l’épidémie actuelle.
Sur la base de données validées scientifiquement, nous pouvons communiquer en direction du grand public, notamment au niveau des populations continentales et montagnardes. En effet, la pollution de la Méditerranée nous choque moins que la pollution de notre lac le plus proche !
Travailler en équipe avec Asters et surtout l’Université de Savoie permet de créer des filières d’études et de s’inscrire dans une durée significative pour les recherches, les analyses mais aussi pour la prise de conscience.
Effectivement. Je parlais de cette thèse qui a été financée notamment par l’Agence de l’Eau, et par la Fondation Université de Savoie et qui nous permet d’inscrire le projet Plastilac dans la durée sur une période de 3 ou 4 ans.
Le laboratoire EDYTEM de l’Université de Savoie encadre la thèse en question et engagera toute une série de démarches visant à étudier la pollution plastique non seulement sur les lacs d’altitude mais aussi sur les lacs de plaine comme le lac du Bourget ou celui d’Annecy.
Les données recueillies dans le cadre de ces recherches permettront d’alimenter des réflexions en associant les partenaires locaux, pouvoirs publics, décideurs, gestionnaires d’espaces …
L’ambition est de mettre en place une dynamique de communication pour faire prendre conscience aux gens qu’il convient changer de modèle. On dit souvent que le politique peut agir quand le citoyen est prêt, d’où l’intérêt de sensibiliser le citoyen ! Les produits fabriqués par l’industrie sont souvent liés au comportement des consommateurs. Si ces derniers sont prêts à changer, le monde industriel devra s’adapter lui aussi.
Et puis actuellement les gens comprennent de plus en plus qu’en agissant même un tout petit peu chacun à son niveau on contribue à un changement collectif.
Absolument, chacun peut agir à son niveau mais il est nécessaire d’impulser un changement structurel sur toute la chaine de valeur du plastique : fabriquant de matière plastique vierge, fabriquant d’objets plastiques, utilisateurs, gestionnaires de déchets
Des changements sont en cours, à titre d’exemple les Eaux d’Évian promettent d’utiliser 100% de plastique recyclé pour leurs bouteilles à l’horizon 2025.
Les travaux menés par des scientifiques permettent de peser sur ces grands sujets de société et contribuent à influencer les décideurs et capitaines d’industrie.
Concernant l’énorme production mondiale de plastique (10 tonnes par seconde), presque la moitié de celle-ci est à usage unique. Il ne faut pas partir en guerre contre le plastique mais plutôt réfléchir à son usage. Un certain nombre de secteurs comme l’aéronautique ou la santé ne peuvent pas se passer du plastique. Toutefois réfléchissons au "suremballage", à "l’emballage de fantaisie" et au "tout-jetable" !
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