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Move-On Magazine

Entretien avec Olivier Colloc, président du Réseau GREEN


GREEN, un réseau ouvert aux bonnes pratiques en matière de mobilité, d’énergie, d’économie circulaire, de biodiversité et de relations humaines pour la Vallée de l’Arve


| Publié le Jeudi 23 Juillet 2020 |

Grand Collectif de GREEN ©DR
Grand Collectif de GREEN ©DR
Olivier, je viens seulement de découvrir l’existence de Green .
Notre vocation n’est pas tant de communiquer que de faire.

Vous jouez entre l’anglicisme et le français.
Ça s’est fait naturellement, GREEN signifie Groupement pour la Responsabilité Environnementale des Entreprises.
Il y a un peu plus de trois ans, l’idée de départ est née autour d’une table. Plusieurs responsables d’entreprises étaient réunis dans cette période de crise de la qualité de l’air dans la Vallée de l’Arve. L’épicentre en est Cluses-Sallanches-Bonneville, mais notre réseau s’étend cependant du Mont Blanc jusqu’au Léman en passant par Annecy. En réalité, il n’y a pas de délimitation géographique. Il progresse par effet de masse et par domiciliation des adhérents.

Et par intérêts vertueux communs.
Autour de cette table, nous discutions de ce que nous pouvions entreprendre par rapport à la question de qualité de l’air. Nous habitons cette Vallée, nous aimons courir en montagne, nous ne pouvions plus le faire, nos enfants ne pouvaient pas courir dans la cour de l’école, nos salariés se demandaient s’ils avaient fait un bon choix en venant travailler dans la Vallée… qui demeure un très bel endroit où vivre.
Un entrepreneur est fait pour entreprendre, pour prendre les choses en mains entre nous, ensemble.

L’étymologie permet de revenir au véritable sens des mots.
Nous nous sommes demandé ce que nous pouvions faire en partant de nos communs. Nous pouvons être concurrents, considérés comme des bons ou des méchants, peu importe : nous respirons le même air, nous buvons la même eau, nous admirons la même montagne : comment préserver ces communs pour préserver l’identité de la Vallée, son attractivité, sa culture ?
Nous sommes partis d’un constat très simple.

À l’inverse des gens qui agitent le mot « valeurs » dans lequel on peut mettre n’importe quoi. Vous partez d’une expérience vécue, partagée.
Nous respirons le même air, c’est une sacrée expérience !
Il était essentiel de pouvoir travailler sur la mobilité parce qu’on se déplace pour aller au travail, on déplace des marchandises, ce qui a un impact sur la qualité de l’air.
Notre 2° point d’action concerne l’énergie nécessaire pour se chauffer, pour faire tourner les machines. Nous souhaitons contrôler notre consommation d’énergie et si possible -ce serait le Graal !- produire localement ce que nous consommons. Soyons créatifs !

L’économie circulaire en circuits courts constitue notre 3° axe. Si je suis scieur de bois, l’un de mes voisins pourra peut-être compacter la sciure que je produis pour en faire des palets avec lesquels un autre voisin se chauffera. En faisant communiquer tout ça, on peut devenir intelligents. On appelle ça de l’écologie industrielle de territoire. Ce que l’on considère comme des déchets peut devenir des intrants soit pour se chauffer, par exemple, soit pour des entrées en production. Il est possible de récupérer des cordes d’escalade pour en faire des granulés de polyamide transformables en toiles.
La finalité est d'éviter à nos déchets d'être incinérés mais de tout mettre en oeuvre pour  les réutiliser, comme le fait la nature !

Notre 4° axe qui est en train d’émerger concerne la biodiversité, les paysages… Notre territoire est beau, il abrite de beaux animaux qu’on a vus davantage pendant le confinement parce qu’ils se sont rapprochés de nous. Nos pelouses ne servent à rien, nos parkings sont souvent inoccupés.... Pourquoi ne pas les mettre en culture ?  Les proposer à nos collaborateurs ou à d’autres ?
On s’est amusés à se dire « Et si on faisait comme ça ? »
 

Réunion de Upcycl'arve. Plateforme d'économie circulaire ©DR
Réunion de Upcycl'arve. Plateforme d'économie circulaire ©DR
Le réseau GREEN 74 permet à tous ses membres de mettre en œuvre et d’échanger des pratiques positives. Il est intéressant de noter que vous utilisez le terme « s’amuser ».
GREEN n’est pas un réseau fermé, il doit accueillir les dirigeants d’entreprises, leurs collaborateurs, les familles de ceux-ci, les voisins, tous les gens qui partagent des communs.
Le réseau doit permettre aux gens qui s’engagent de s’amuser. L’écologie punitive ne doit être que le dernier recours. Nous souhaitons créer du lien entre les gens. Le réseau a permis à des entreprises qui ne se connaissaient pas, ATMB qui n’a rien à voir avec Décathlon ou Rossignol, ni avec des décolleteurs ou des gens qui travaillent le bois ou bien le boucher du coin de se retrouver sur ces communs.
Chacun agit à sa mesure, quand il en a le temps. Nos 4 axes permettent de mettre en relation tous ceux qui souhaitent participer. Tout le monde est bienvenu.
Ce mode de fonctionnement ne présente pas que des avantages. Certains sont déjà engagés dans des actions et donc plus lents à démarrer sur d’autres questions. Nous sommes tous bénévoles. C’est pour cette raison que la démarche doit être sympa, ludique...

Vous contribuez à redéfinir la notion d’entreprise. Souvent, on oublie la vie des gens qui y participent, les liens avec l’environnement humain, social, naturel…
L’entreprise est un lieu de vie, un lieu où on crée, on produit, on fait commerce. Faire commerce signifie « se mettre en relation avec ».
À plusieurs cerveaux, on est plus intelligents, surtout quand on a des angles de vue différents comme quand on imagine ensemble une solution concrète sur un thème donné avec quelqu’un qui travaille à l’entretien des routes, un autre qui travaille en poste de nuit dans le décolletage et un autre dans le commerce. Il est particulièrement intéressant de travailler sur un sujet commun à partir de prismes différents.

Comme votre démarche repose sur le bénévolat, sur la bonne volonté de chacun et non sur des contraintes, elle invite sans doute à une vraie discussion entre les uns et les autres.
Elle crée des liens entre des secteurs qui ne se parlaient pas, qui étaient en silos. La crise de 2008 avait créé des réseaux par secteurs d’activités, comme Mont Blanc Industrie, des pôles de compétitivité. GREEN est désectorisé. Une association qui aurait des employés, une mairie, une école peuvent participer à GREEN dans la mesure où ils partagent des communs avec le réseau. Nous sommes une communauté de partage. Nous souscrivons à une plateforme de covoiturage, à une autre d’économie circulaire, nous avons constitué un groupement d’achat de vélos, voilà pour le concret. Le principal bénéfice cependant est l’échange de bonnes pratiques et l’émulation que cela génère.

Le chemin qu’on fait ensemble.
Que chacun repique, transpose à l’image d’un jardinier qui repique des plants dans son jardin : ça prend ou non, mais il essaye pour trouver la méthode qui correspond à son contexte et à ses enjeux.

Chacun garde sa liberté d’action.
En participant à un effet de groupe. Par exemple ce matin je viens de faire mon miel, ou plutôt “notre” miel car c’est dans le cadre d’un rucher collectif d’entreprise. Il y a un an et demi, j’avais peur des abeilles et je n’aurais pas imaginé ce moment partagé avec des membres de mon entreprise. On apprend beaucoup en s’amusant à plusieurs, dehors, on pousse ses limites...

Avez-vous des relations avec des élus, de quel ordre ?
Ils nous connaissent mais nous sommes une sorte d’OVNI. Nous ne sommes pas une structure avec des frais de fonctionnement importants. Le coût d’une adhésion pour une entreprise représente 9 euros pour un temps plein de salarié à l’année. Cette année, c’est encore un peu moins en raison des difficultés particulières liées à la crise sanitaire et à ses conséquences .
Le principe est la frugalité, peu d’interventions professionnelles, beaucoup de temps donné. Les élus nous aiment bien mais ils ne savent pas très bien à qui s’adresser parce que nous sommes un bureau qui fonctionne à plusieurs. Même si nous avons des relations, nous ne sommes pas un objet de communication vers ou pour les élus, ni vers les entreprises extérieures ; nous sommes avant tout un objet pour faire ensemble.
Nos relations avec les élus sont bonnes, nous ne leur demandons pas d’argent. Notre action est bien vue puisqu’elle est positive pour le territoire.

Certains ne cherchent pas à s’inspirer de votre démarche ?
Des gens d’Albertville, d’Annecy ou d’ailleurs nous ont exprimé leur souhait d’adhérer à GREEN. On leur répond qu’on peut leur donner les clés du camion pour qu’ils fassent la même chose chez eux et qu’on échange pour constituer un réseau de réseaux. La démarche a plus de sens si elle reste dans un périmètre local comparable à la Vallée de l’Arve. C’est comme pour les abeilles: elles agissent en local, sans bruit, puis quand elles se développent essaiment sur d’autres territoires ...
 
Retrouvez toutes les informations du réseau sur reseau.green

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