Xavier Cornette de Saint Cyr nous parle de son livre qui traite d’un sujet plutôt tabou et complète le tableau des violences qui peuvent s’exercer dans un couple.
Quelles raisons vous ont poussé à écrire ce livre ?
La première est qu’il n’existe pas d’ouvrage sur cette thématique. Il y en a à foison sur les manipulateurs qui maltraitent les femmes, quasiment aucun sur les femmes qui manipulent les hommes. Ce livre comble un vide.
Je souhaitais d’autre part donner la parole à ces hommes. Imaginez comment est reçu un homme qui va au commissariat déclarer « Je suis maltraité par ma femme. » Je souhaitais montrer à ces hommes qu’il existe des solutions pour s’en sortir.
Le 3° objectif est de faire comprendre à l’entourage en quoi consiste l’emprise. Une prison mentale est dix fois supérieure à la prison avec des barreaux. Il est inutile de dire à un homme « Si elle ne te plaît pas, tu n’as qu’à la quitter. » S’il le pouvait, il l’aurait déjà fait ! L’entourage a vraiment du mal à comprendre ce phénomène psychique : il n’écoute pas et donne de mauvais conseils.
On pense en général que seuls les hommes faibles sont victimes de cette emprise.
Exactement. Le dernier objectif -un vœu pieux pour l’instant- serait que le personnel soignant, les policiers, les magistrats comprennent le phénomène de l’emprise parce qu’ils n’y connaissent quasiment rien.
Quand vous recevez un coup il y a des bleus, un certificat médical peut en témoigner ; mais lorsque vous recevez un coup psychique, ça ne se voit pas. « Vous êtes faible, vous auriez dû ceci ou cela… » on énonce des formules sans comprendre ce dont il s’agit. Certaines emprises terribles entraînent des issues dramatiques qui peuvent aller jusqu’au meurtre ou au suicide.
Est-ce que le problème de l’emprise existe dans les couples homosexuels ?
C’est une excellente question, j’imagine que oui. L’emprise est une relation entre deux personnes, l’une voulant soumettre l’autre. Le phénomène doit pouvoir se construire de la même manière entre hétérosexuels ou entre homosexuels.
Cette volonté de soumission préexiste-t-elle à la relation ? Est-ce une pathologie qui s’incarne dans la relation ?
C’est généralement préexistant. Il y a psychologiquement des tas de causes, de raisons mais en gros un prédateur ou une prédatrice guette sa proie et s’en saisit grâce à une stratégie. Au départ, c’est la lune de miel, c’est merveilleux…
Un voleur qui aurait la tête d’un voleur aurait peu de chances de réussir.
Petit à petit un certain nombre de choses se mettent en route.
Cette volonté de pouvoir sur l’autre a l’air assez répandue si on fait la somme des manipulateurs et des manipulatrices. C’est une pathologie ?
Les relations de pouvoir existent dans de nombreux couples, un peu comme dans une équipe où émerge un leader à un moment donné. Tout ceci ne pose pas de difficulté majeure. Cette prise de pouvoir pose problème quand elle est axée sur la destruction de l’autre, sur le désir de s’approprier toutes ses qualités. Dans cette situation, je ne veux pas simplement le dominer, je veux également le réduire, le rendre esclave. Par une intrusion dans son psychisme, je le détruis.
La seule issue serait la séparation ?
Oui, soit je tue l’autre, soit je le quitte ! (rires qui soulignent l’ironie du propos).
Le crime parfait n’existant pas…
Mieux vaut la séparation, je vous l’accorde. C’était une boutade de ma part. Un manipulateur ou une manipulatrice ne se remet pas en cause, n’a jamais tort. Il a l’art de retourner les responsabilités et d’embobiner les magistrats en se présentant toujours comme victime.
Si vous accusez la personne d’être dans la manipulation, vous allez vous faire engueuler comme ce n’est pas possible. Les manipulateurs savent toujours se justifier.
La logique de ces personnes fonctionne en circuit fermé, en dehors d’une logique en prise avec d’autres réalités que la leur.
Il faut une finesse psychologique pour comprendre le phénomène, certains psys se font même avoir. Un minimum de compréhension de l’emprise est nécessaire pour ne pas porter un jugement hâtif sur les faits, les situations. Il faut éventuellement demander un complément d’enquête.
Prenons l’exemple de cette femme victime d’emprise, de violences, de coups. Elle revient un jour chez son mari qui la défenestre. Le magistrat réfute l’idée de manipulation puisqu’elle était revenue chez son mari. Il a tort parce qu’il ne prend pas en considération le phénomène de l’emprise.
Il y a souvent chez les victimes une sorte de honte et de culpabilité de s’être fait avoir, et aussi une volonté de comprendre…quand il n’y a plus rien à comprendre.
Ce que vous dites est très important. On essaye de mettre une rationalité sur quelque chose qui est irrationnel. Le psychisme humain a besoin de dire « Il y a petit a, petit b, petit c… » alors qu’il n’y a pas de logique dans l’emprise, ça part dans tous les sens, ce qui fait que vous êtes complètement désarçonné. Les manipulatrices utilisent ce que j’appelle le principe de la gifle et de la caresse, elles passent de la douceur à la violence extrême en un instant sans aucune logique. De quoi perdre vos repères.
La situation est d’autant plus complexe pour ces hommes sous emprise qu’on met actuellement, et à juste titre, l’accent sur les violences faites aux femmes.
Je n’en parle pas dans ce livre mais il y a aussi tout le volet des hommes battus qui ferait se moquer la société : le sexe fort battu par le sexe faible ! Les femmes cependant utilisent moins la force physique que les hommes, elles se tournent davantage vers la violence psychologique.
Peut-on avancer que la pratique de la pêche à la ligne, du sport et de la pétanque peut être une échappatoire pour certains hommes ?
Ça ferait un chapitre intéressant. (rires sans doute liés à la gravité du sujet).
On imagine que les personnes manipulées sont peu intelligentes. En réalité les proies les plus intéressantes sont des personnes cultivées parce qu’il est possible de mettre complètement en l’air leur besoin de logique. Il est plus difficile d’installer une emprise sur quelqu’un qui aurait le QI d’une huître et de déstructurer son système de pensée.
Les proies sont des personnes profondément gentilles, bienveillantes. J’ai besoin de faire plaisir à l’autre, c’est pourquoi j’accède à ses demandes. Si on me fait un reproche, je culpabilise, je n’en ai peut-être pas fait assez, j’ai mal fait… Au bout d’un moment, je finis par oublier mes propres besoins pour satisfaire uniquement ceux de l’autre. Ce déséquilibre ne fait que s’accentuer.
Quelles raisons vous ont poussé à écrire ce livre ?
La première est qu’il n’existe pas d’ouvrage sur cette thématique. Il y en a à foison sur les manipulateurs qui maltraitent les femmes, quasiment aucun sur les femmes qui manipulent les hommes. Ce livre comble un vide.
Je souhaitais d’autre part donner la parole à ces hommes. Imaginez comment est reçu un homme qui va au commissariat déclarer « Je suis maltraité par ma femme. » Je souhaitais montrer à ces hommes qu’il existe des solutions pour s’en sortir.
Le 3° objectif est de faire comprendre à l’entourage en quoi consiste l’emprise. Une prison mentale est dix fois supérieure à la prison avec des barreaux. Il est inutile de dire à un homme « Si elle ne te plaît pas, tu n’as qu’à la quitter. » S’il le pouvait, il l’aurait déjà fait ! L’entourage a vraiment du mal à comprendre ce phénomène psychique : il n’écoute pas et donne de mauvais conseils.
On pense en général que seuls les hommes faibles sont victimes de cette emprise.
Exactement. Le dernier objectif -un vœu pieux pour l’instant- serait que le personnel soignant, les policiers, les magistrats comprennent le phénomène de l’emprise parce qu’ils n’y connaissent quasiment rien.
Quand vous recevez un coup il y a des bleus, un certificat médical peut en témoigner ; mais lorsque vous recevez un coup psychique, ça ne se voit pas. « Vous êtes faible, vous auriez dû ceci ou cela… » on énonce des formules sans comprendre ce dont il s’agit. Certaines emprises terribles entraînent des issues dramatiques qui peuvent aller jusqu’au meurtre ou au suicide.
Est-ce que le problème de l’emprise existe dans les couples homosexuels ?
C’est une excellente question, j’imagine que oui. L’emprise est une relation entre deux personnes, l’une voulant soumettre l’autre. Le phénomène doit pouvoir se construire de la même manière entre hétérosexuels ou entre homosexuels.
Cette volonté de soumission préexiste-t-elle à la relation ? Est-ce une pathologie qui s’incarne dans la relation ?
C’est généralement préexistant. Il y a psychologiquement des tas de causes, de raisons mais en gros un prédateur ou une prédatrice guette sa proie et s’en saisit grâce à une stratégie. Au départ, c’est la lune de miel, c’est merveilleux…
Un voleur qui aurait la tête d’un voleur aurait peu de chances de réussir.
Petit à petit un certain nombre de choses se mettent en route.
Cette volonté de pouvoir sur l’autre a l’air assez répandue si on fait la somme des manipulateurs et des manipulatrices. C’est une pathologie ?
Les relations de pouvoir existent dans de nombreux couples, un peu comme dans une équipe où émerge un leader à un moment donné. Tout ceci ne pose pas de difficulté majeure. Cette prise de pouvoir pose problème quand elle est axée sur la destruction de l’autre, sur le désir de s’approprier toutes ses qualités. Dans cette situation, je ne veux pas simplement le dominer, je veux également le réduire, le rendre esclave. Par une intrusion dans son psychisme, je le détruis.
La seule issue serait la séparation ?
Oui, soit je tue l’autre, soit je le quitte ! (rires qui soulignent l’ironie du propos).
Le crime parfait n’existant pas…
Mieux vaut la séparation, je vous l’accorde. C’était une boutade de ma part. Un manipulateur ou une manipulatrice ne se remet pas en cause, n’a jamais tort. Il a l’art de retourner les responsabilités et d’embobiner les magistrats en se présentant toujours comme victime.
Si vous accusez la personne d’être dans la manipulation, vous allez vous faire engueuler comme ce n’est pas possible. Les manipulateurs savent toujours se justifier.
La logique de ces personnes fonctionne en circuit fermé, en dehors d’une logique en prise avec d’autres réalités que la leur.
Il faut une finesse psychologique pour comprendre le phénomène, certains psys se font même avoir. Un minimum de compréhension de l’emprise est nécessaire pour ne pas porter un jugement hâtif sur les faits, les situations. Il faut éventuellement demander un complément d’enquête.
Prenons l’exemple de cette femme victime d’emprise, de violences, de coups. Elle revient un jour chez son mari qui la défenestre. Le magistrat réfute l’idée de manipulation puisqu’elle était revenue chez son mari. Il a tort parce qu’il ne prend pas en considération le phénomène de l’emprise.
Il y a souvent chez les victimes une sorte de honte et de culpabilité de s’être fait avoir, et aussi une volonté de comprendre…quand il n’y a plus rien à comprendre.
Ce que vous dites est très important. On essaye de mettre une rationalité sur quelque chose qui est irrationnel. Le psychisme humain a besoin de dire « Il y a petit a, petit b, petit c… » alors qu’il n’y a pas de logique dans l’emprise, ça part dans tous les sens, ce qui fait que vous êtes complètement désarçonné. Les manipulatrices utilisent ce que j’appelle le principe de la gifle et de la caresse, elles passent de la douceur à la violence extrême en un instant sans aucune logique. De quoi perdre vos repères.
La situation est d’autant plus complexe pour ces hommes sous emprise qu’on met actuellement, et à juste titre, l’accent sur les violences faites aux femmes.
Je n’en parle pas dans ce livre mais il y a aussi tout le volet des hommes battus qui ferait se moquer la société : le sexe fort battu par le sexe faible ! Les femmes cependant utilisent moins la force physique que les hommes, elles se tournent davantage vers la violence psychologique.
Peut-on avancer que la pratique de la pêche à la ligne, du sport et de la pétanque peut être une échappatoire pour certains hommes ?
Ça ferait un chapitre intéressant. (rires sans doute liés à la gravité du sujet).
On imagine que les personnes manipulées sont peu intelligentes. En réalité les proies les plus intéressantes sont des personnes cultivées parce qu’il est possible de mettre complètement en l’air leur besoin de logique. Il est plus difficile d’installer une emprise sur quelqu’un qui aurait le QI d’une huître et de déstructurer son système de pensée.
Les proies sont des personnes profondément gentilles, bienveillantes. J’ai besoin de faire plaisir à l’autre, c’est pourquoi j’accède à ses demandes. Si on me fait un reproche, je culpabilise, je n’en ai peut-être pas fait assez, j’ai mal fait… Au bout d’un moment, je finis par oublier mes propres besoins pour satisfaire uniquement ceux de l’autre. Ce déséquilibre ne fait que s’accentuer.
Votre livre vient de sortir. Avez-vous déjà eu des retours de lecteurs ?
Ce sont pour l’instant des retours de lectrices.
Repentantes ?
Non ! Elles découvrent quelque chose dont elles avaient entendu parler mais dont elles ne connaissaient pas tous les ressorts. Des hommes m’ont signalé qu’ils sont en train de lire le bouquin. Beaucoup découvrent un phénomène dont on parle très peu. Manipulateurs et manipulatrices ne représentent que 4 à 5 % de la population mais ils font des dégâts tellement importants ! Ils mettent en l’air la vie d’une personne. Des témoignages que certains hommes m’ont confiés montrent que des situations durent depuis 20 ou 30 ans.
La séparation est souvent difficile car les enfants la compliquent. Ils peuvent servir de monnaie d’échange, être montés contre le père au point de le frapper. C’est ce qui est arrivé à ce chirurgien qui m’a appelé en catastrophe parce qu’il n’était pas en état d’assurer une opération programmée.
Il faut d’abord arriver à prendre la décision d’une séparation et puis une reconstruction est indispensable.
Elle est problématique. Il faut du temps pour se remettre de blessures profondes et rétablir des liens de confiance.
Nous avons évoqué la nécessité d’une formation à destination des soignants, des policiers, des magistrats. Vous avez eu l’occasion de vous adresser à certains corps de métiers en ce sens ?
Pas encore. Christel Petitcollin qui signe la préface de mon livre, avait écrit un ouvrage sur les manipulateurs. Elle en avait envoyé des exemplaires aux professions qui auraient pu être intéressées. Seule une fac lui a répondu et son intervention s’est limitée à une matinée, ce qui est insignifiant.
Le contenu de votre livre doit être encore un peu exotique pour beaucoup de gens.
C’est pourquoi je n’ai pas rapporté tout ce qui m’a été dit en termes de violences sinon j’aurais pu être accusé d’affabulation.
Ce sont pour l’instant des retours de lectrices.
Repentantes ?
Non ! Elles découvrent quelque chose dont elles avaient entendu parler mais dont elles ne connaissaient pas tous les ressorts. Des hommes m’ont signalé qu’ils sont en train de lire le bouquin. Beaucoup découvrent un phénomène dont on parle très peu. Manipulateurs et manipulatrices ne représentent que 4 à 5 % de la population mais ils font des dégâts tellement importants ! Ils mettent en l’air la vie d’une personne. Des témoignages que certains hommes m’ont confiés montrent que des situations durent depuis 20 ou 30 ans.
La séparation est souvent difficile car les enfants la compliquent. Ils peuvent servir de monnaie d’échange, être montés contre le père au point de le frapper. C’est ce qui est arrivé à ce chirurgien qui m’a appelé en catastrophe parce qu’il n’était pas en état d’assurer une opération programmée.
Il faut d’abord arriver à prendre la décision d’une séparation et puis une reconstruction est indispensable.
Elle est problématique. Il faut du temps pour se remettre de blessures profondes et rétablir des liens de confiance.
Nous avons évoqué la nécessité d’une formation à destination des soignants, des policiers, des magistrats. Vous avez eu l’occasion de vous adresser à certains corps de métiers en ce sens ?
Pas encore. Christel Petitcollin qui signe la préface de mon livre, avait écrit un ouvrage sur les manipulateurs. Elle en avait envoyé des exemplaires aux professions qui auraient pu être intéressées. Seule une fac lui a répondu et son intervention s’est limitée à une matinée, ce qui est insignifiant.
Le contenu de votre livre doit être encore un peu exotique pour beaucoup de gens.
C’est pourquoi je n’ai pas rapporté tout ce qui m’a été dit en termes de violences sinon j’aurais pu être accusé d’affabulation.
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