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Move-On Magazine

Le Cri Sélectif, chorale alternative dans la continuité


Une chorale qui a du cœur (libertaire et joyeux)

Rencontre avec Frédéric Stotz


| Publié le Dimanche 19 Janvier 2020 |

Le Cri Sélectif, chorale alternative dans la continuité ©Fanchon Bilbille
Le Cri Sélectif, chorale alternative dans la continuité ©Fanchon Bilbille
Fred, comment est née cette chorale ?
A mon retour de Bangkok, où je travaillais, j’ai été appelé par le Brise Glace qui cherchait à monter une chorale. C’était en 2015.Les gens sont venus s’inscrire très rapidement, dès mon premier appel et j’ai été séduit par l’aspect atypique de leur démarche :beaucoup n’étaient pas dans le milieu de la musique.
Les choses se sont très bien passées jusqu’au changement de direction du Brise Glace. On m’a alors signifié que la chorale n’y avait plus sa place. Grâce à la mairie j’ai pu retrouver en quinze jours une salle où répéter. Il fallait faire vite puisque 60 personnes étaient déjà inscrites ! J’apprécie d’autant plus le soutien de la mairie que notre répertoire est particulièrement original.
Nous nous appelons "Le Cri Sélectif" parce que j’aime bien ce type de jeu de mots. Sélectif, on ne l’est pas du tout, on accepte tout le monde. Le Cri Sélectif est une chorale libertaire qui joue du premier et du second degré : je m’amuse à jouer au gourou dictateur.

Mais le fait de titiller le lobe d’oreille de tes choristes risque de te valoir des ennuis en justice !
C’est Napoléon qui m’a inspiré cette pratique. (rires) Avant de partir à Bangkok, de 2011 à 2013, j’avais monté un spectacle sur l’art dégénéré dans les années 30. La mise à l’écart de l’art considéré comme dégénéré…

Par les nazis.
Pas uniquement. Eux ont finalement classé "dégénéré" un art qui leur plaisait beaucoup. Le spectacle a tourné à Lyon, en Savoie, Haute-Savoie. Il en reste des CD puisque nous avions créé une musique pour l’occasion. Cet "art dégénéré" était d’une telle richesse qu’il est l’origine de ce qui existe aujourd’hui. J’aime bien fouiller là-dedans, jouer. L’idéal serait de donner des chansons totalement anarchistes, des hymnes totalitaires aussi, de faire passer un message libertaire en utilisant, pourquoi pas ? des choses déplaisantes. S’amuser comme peut le faire Charlie Hebdo, de la provocation qui bouscule pour faire réfléchir.

Le Cri Sélectif, chorale alternative dans la continuité ©Fanchon Bilbille
Le Cri Sélectif, chorale alternative dans la continuité ©Fanchon Bilbille
J’ai assisté au concert du Cri Sélectif à l’Auditorium de Seynod. L’énergie que vous produisez est frappante. Ça change du côté parfois bien rangé des chorales.
Je viens du milieu punk, j’apprécie l’immédiateté, le côté "pas fini" un peu adolescent. Les notables m’ennuient, je leur préfère la fraîcheur.

On a pu vous voir à l’Auditorium. Vous vous produisez où prochainement ?
En mars, au Carnaval d’Annecy. J’ai insisté pour qu’on puisse y donner notre répertoire, qui comporte des chansons de La Commune, de Philippe Katerine. Nous tournons essentiellement sur Annecy parce que nos soixante choristes ont des familles, des boulots et qu’il faut en tenir compte. Il y a parmi eux de gros salaires, des ouvriers, des infirmières, pas mal de profs.

L’époque est difficile pour eux, ils doivent décompresser. (rires attendris)
Les gens oublient leurs boulots et viennent uniquement pour chanter ensemble et former une mini société. C’est pour ça que ça marche.
 

Le Cri Sélectif, chorale alternative dans la continuité ©Fanchon Bilbille
Le Cri Sélectif, chorale alternative dans la continuité ©Fanchon Bilbille
Comme je n’y connais rien, je me suis demandé pourquoi les choristes se déplacent sur la scène au fil des chansons.
Parce que je ne classe pas les chanteurs par voix, par registres de voix ; pour que chacun s’amuse il est nécessaire qu’il puisse utiliser ses voix en fonction du répertoire, en changer. C’est l’inverse de ce qu’on pratique habituellement et qui consiste à classer les chanteurs en fonction de la demande. C’est ennuyeux.
Je suis d’abord professeur de chant et la pratique de chef de chœur est venue ensuite.

D’où la nécessité de porter casquette et veste pendant les concerts pour être crédible ?
Je n’ai pas toujours ce genre de vêtements mais j’aime bien. Il m’arrive même d’avoir un fouet, d’utiliser tout ce qui ramène à l’ordre radical.

L’énergie dont fait preuve Le Cri Sélectif sur scène fait penser qu’un spectacle serait un prolongement naturel.
Oui, mais on ne se voit qu’une fois par semaine, beaucoup de nouveaux sont arrivés en octobre dernier, il y a les vacances.

Il faut supprimer les vacances.
Et travailler pour l’art !
 
 

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