« On est tous à poils devant ça... »
Votre documentaire « Legacy » commence avec des images de vous et de votre femme lorsque vous étiez au Kenya. Êtes-vous nostalgique de ce temps-là ? Dans le film, vous dites « jamais je ne me suis senti aussi vivant et heureux ».
Oui. Ce que je dis souvent, c’est que l’on se souvient toujours des moments terribles de votre vie : la mort des proches, les maladies... Mais on ne se souvient pas tellement des moments heureux ; c’est-à-dire qu'on n'en profite pas assez. Je me dis qu’avec du recul, je n’ai peut-être pas assez compris que j'étais heureux à ce moment-là et je n’ai pas assez profité. On est tous un peu les mêmes. On se souvient moins des moments de bonheur que des moments de malheur. Ça paraît normal. On ne profite pas assez des instants présents.
Avez-vous prévu de retourner au Kenya ?
Non, parce que je ne prends plus l'avion. Je voulais y emmener mes petits enfants, mais je pense que je ne le ferai pas.
Dans votre film, vous dites « ce n’est pas la terre que nous devons faire mourir, c'est notre vision du progrès ». Quelle est votre propre vision du progrès ?
Vous savez, je ne suis pas un futurologue. Je ne suis qu'un photographe qui réfléchit. Le film pose très bien les problèmes du monde. Aujourd’hui, moi, je crois en un progrès avec plus de bienveillance et plus d’amour de la vie autour de soi. On est dans un monde complètement basé sur la croissance. Il faut peut-être apprendre à vivre mieux avec moins. Je suis un privilégié, donc c'est facile pour moi de dire ça. Il y a des gens qui ont besoin d'avoir plus. C'est ma vision, mais ce n'est pas la vision des autres. On s'occupe de pas mal de réfugiés. Je peux vous dire que quand vous habitez dans un pays où il n'y a pas de démocratie, pas de travail, pas de service de santé, et bien vous n'avez qu'une seule envie, c'est de venir dans ce paradis que vous voyez à la télévision, sur vos téléphones portables avec Internet. Ce paradis où les gens vivent bien, où les gens ont de quoi manger, où les gens gagnent bien leur vie. Mais limiter cette croissance-là est impossible. Malheureusement, tout le monde ne peut pas vivre comme nous. Je ne pense pas qu’on soit prêt à vivre avec moins, donc c'est une équation qui coince et que personne n'a résolue.
Oui. Ce que je dis souvent, c’est que l’on se souvient toujours des moments terribles de votre vie : la mort des proches, les maladies... Mais on ne se souvient pas tellement des moments heureux ; c’est-à-dire qu'on n'en profite pas assez. Je me dis qu’avec du recul, je n’ai peut-être pas assez compris que j'étais heureux à ce moment-là et je n’ai pas assez profité. On est tous un peu les mêmes. On se souvient moins des moments de bonheur que des moments de malheur. Ça paraît normal. On ne profite pas assez des instants présents.
Avez-vous prévu de retourner au Kenya ?
Non, parce que je ne prends plus l'avion. Je voulais y emmener mes petits enfants, mais je pense que je ne le ferai pas.
Dans votre film, vous dites « ce n’est pas la terre que nous devons faire mourir, c'est notre vision du progrès ». Quelle est votre propre vision du progrès ?
Vous savez, je ne suis pas un futurologue. Je ne suis qu'un photographe qui réfléchit. Le film pose très bien les problèmes du monde. Aujourd’hui, moi, je crois en un progrès avec plus de bienveillance et plus d’amour de la vie autour de soi. On est dans un monde complètement basé sur la croissance. Il faut peut-être apprendre à vivre mieux avec moins. Je suis un privilégié, donc c'est facile pour moi de dire ça. Il y a des gens qui ont besoin d'avoir plus. C'est ma vision, mais ce n'est pas la vision des autres. On s'occupe de pas mal de réfugiés. Je peux vous dire que quand vous habitez dans un pays où il n'y a pas de démocratie, pas de travail, pas de service de santé, et bien vous n'avez qu'une seule envie, c'est de venir dans ce paradis que vous voyez à la télévision, sur vos téléphones portables avec Internet. Ce paradis où les gens vivent bien, où les gens ont de quoi manger, où les gens gagnent bien leur vie. Mais limiter cette croissance-là est impossible. Malheureusement, tout le monde ne peut pas vivre comme nous. Je ne pense pas qu’on soit prêt à vivre avec moins, donc c'est une équation qui coince et que personne n'a résolue.
Dans le documentaire, on voit des images très impressionnantes, notamment des images des villes totalement vides à cause de la pandémie. Pensez-vous que cette pandémie mondiale va amener beaucoup de personnes à une prise de conscience ?
C'est très compliqué de parler pour les autres. Il est évident qu’aujourd'hui cette crise permet de voir qu’on n’est pas capable de tout résoudre. On est tous piqué au génie humain en disant « on va trouver la solution ». Il y a beaucoup de gens qui sont persuadés qu'on va trouver la solution contre le changement climatique. Il y a beaucoup de gens qui le pensent ou même s’ils ne le pensent pas, ils aimeraient que ça se passe. En fin de compte, on voit que l’on est tous démunis devant ça. Aujourd’hui, on est tous à poils devant ça. J'ai vu l'autre jour que 95 % des vaccins sont utilisés pour 15 % de la population mondiale. Vous imaginez la justice qu'il y a là-aussi, c'est dingue ! Aujourd'hui les vaccins, ce sont les pays riches qui s'en servent. Ce ne sont pas les pays en voie de développement. Je pense qu'il faut faire le deuil du monde d'avant, le monde où l'on était un peu insouciant, où l'on croyait en un avenir serein... Aujourd’hui, il y a le changement climatique, il y a cette pandémie et on s'aperçoit que la vie de nos proches est importante. Alors il y a une espèce de réflexion : quelle est la chose la plus précieuse dans la vie ? C'est la vie tout simplement.
C'est très compliqué de parler pour les autres. Il est évident qu’aujourd'hui cette crise permet de voir qu’on n’est pas capable de tout résoudre. On est tous piqué au génie humain en disant « on va trouver la solution ». Il y a beaucoup de gens qui sont persuadés qu'on va trouver la solution contre le changement climatique. Il y a beaucoup de gens qui le pensent ou même s’ils ne le pensent pas, ils aimeraient que ça se passe. En fin de compte, on voit que l’on est tous démunis devant ça. Aujourd’hui, on est tous à poils devant ça. J'ai vu l'autre jour que 95 % des vaccins sont utilisés pour 15 % de la population mondiale. Vous imaginez la justice qu'il y a là-aussi, c'est dingue ! Aujourd'hui les vaccins, ce sont les pays riches qui s'en servent. Ce ne sont pas les pays en voie de développement. Je pense qu'il faut faire le deuil du monde d'avant, le monde où l'on était un peu insouciant, où l'on croyait en un avenir serein... Aujourd’hui, il y a le changement climatique, il y a cette pandémie et on s'aperçoit que la vie de nos proches est importante. Alors il y a une espèce de réflexion : quelle est la chose la plus précieuse dans la vie ? C'est la vie tout simplement.
Cataractes de la rivière Idivo, Parc national de l’Ivindo, province de l'Ogooué-Ivindo, Gabon © Legacy
Le film « Legacy » a été refusé par France Télévision et d'autre chaînes parce qu'il était jugé trop pessimiste. Pensez-vous que les gens sont dans le déni ? Qu'ils ont peur ?
Vous savez, j'avais peut-être mal présenté le film. J'ai certainement un manque d'humilité et de modestie là-dessus. Nous, on ne fait pas de mauvais films. Je n'ai jamais fait de films dont je ne suis pas fier et content de montrer. Les films que je fais, ils sont bons, on travaille, on prend plus de risques, on essaye d'être profond. Alors c'est prétentieux de dire ça, mais j'assume. Aujourd’hui, quand je construis un film, je mets tout dedans. Je ne fais pas des films pour faire de l’audience. Je fais des films pour faire avancer la conscience, comme toi, comme tous autour de nous, on essaye de faire avancer le monde. Ce n’est pas le déni. C’est que quand vous êtes directeur de chaînes, directeur de programme, vous avez envie de faire de l'audience parce que c'est ce qu'on vous demande. L'audience, c'est ce qui amène la pub, la pub, c'est ce qui amène l'argent, l'argent, c'est que qui vous permet de payer les gens... Vous voyez ce que je veux dire. C'est vrai que les films qu'on fait ne sont pas toujours très positifs, ça fait un peu peur aux gens. En fin de compte, sur M6, on a fait un carton avec ce film. Surtout, ce qui est intéressant, c'est qu'on a battu des records chez les jeunes.
Vous savez, j'avais peut-être mal présenté le film. J'ai certainement un manque d'humilité et de modestie là-dessus. Nous, on ne fait pas de mauvais films. Je n'ai jamais fait de films dont je ne suis pas fier et content de montrer. Les films que je fais, ils sont bons, on travaille, on prend plus de risques, on essaye d'être profond. Alors c'est prétentieux de dire ça, mais j'assume. Aujourd’hui, quand je construis un film, je mets tout dedans. Je ne fais pas des films pour faire de l’audience. Je fais des films pour faire avancer la conscience, comme toi, comme tous autour de nous, on essaye de faire avancer le monde. Ce n’est pas le déni. C’est que quand vous êtes directeur de chaînes, directeur de programme, vous avez envie de faire de l'audience parce que c'est ce qu'on vous demande. L'audience, c'est ce qui amène la pub, la pub, c'est ce qui amène l'argent, l'argent, c'est que qui vous permet de payer les gens... Vous voyez ce que je veux dire. C'est vrai que les films qu'on fait ne sont pas toujours très positifs, ça fait un peu peur aux gens. En fin de compte, sur M6, on a fait un carton avec ce film. Surtout, ce qui est intéressant, c'est qu'on a battu des records chez les jeunes.
Un petit mot d'actualité ?
Le film est en replay pendant un an pour ceux qui aimeraient aller le voir ! On commence un autre film sur la biodiversité en France. Ce film sera sur tout le vivant qui nous entoure, les bactéries qu'on a dans le ventre, les acariens qu'on a dans le lit, jusqu'aux loups et aux ours. On est entouré de vivant sans comprendre qu'on est au milieu de ce vivant, qu'on est une espèce qui s'est développée. Aujourd'hui les vers de terres sont beaucoup plus nombreux que les hommes. Je crois que la masse des vers de terres, c'est vingt fois la masse des hommes. Je suis en train de préparer un film là-dessus et ça me passionne. Je dois reconnaître que j'ai un métier formidable, que j'adore, et que je n’ai pas peur de ma chance. La chance, elle passe toujours quelque part, il ne faut pas en avoir peur. Il ne faut pas avoir peur de pendre des risques et de se dire « voilà, la chance elle est là, il faut que je la prenne ». Et dans la vie, si on ne prend pas de risques, on n’avance pas. J'ai fait une émission sur Thinkerview. Vous pouvez aller la regarder. C’est une chaîne YouTube avec beaucoup de gens formidables comme Gaël Giraud, Jean-Marc Jancovici qui ont parlé. Si ça vous intéresse de me connaître, vous retrouvez pas mal de choses !
Le film est en replay pendant un an pour ceux qui aimeraient aller le voir ! On commence un autre film sur la biodiversité en France. Ce film sera sur tout le vivant qui nous entoure, les bactéries qu'on a dans le ventre, les acariens qu'on a dans le lit, jusqu'aux loups et aux ours. On est entouré de vivant sans comprendre qu'on est au milieu de ce vivant, qu'on est une espèce qui s'est développée. Aujourd'hui les vers de terres sont beaucoup plus nombreux que les hommes. Je crois que la masse des vers de terres, c'est vingt fois la masse des hommes. Je suis en train de préparer un film là-dessus et ça me passionne. Je dois reconnaître que j'ai un métier formidable, que j'adore, et que je n’ai pas peur de ma chance. La chance, elle passe toujours quelque part, il ne faut pas en avoir peur. Il ne faut pas avoir peur de pendre des risques et de se dire « voilà, la chance elle est là, il faut que je la prenne ». Et dans la vie, si on ne prend pas de risques, on n’avance pas. J'ai fait une émission sur Thinkerview. Vous pouvez aller la regarder. C’est une chaîne YouTube avec beaucoup de gens formidables comme Gaël Giraud, Jean-Marc Jancovici qui ont parlé. Si ça vous intéresse de me connaître, vous retrouvez pas mal de choses !
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Move-On Magazine est originaire des Pays de Savoie. Avez-vous prévu de venir faire un tournage dans notre région ?
Je suis en train de préparer un film qui s'appelle « France ». C'est une histoire d'amour dans laquelle je vais aller à la rencontre des Français et je veux qu'on aille là-bas. Tout a été arrêté à cause du Covid. On voyage beaucoup moins à l'étranger donc on a comme projet de faire une grande tournée à travers la France.
Quand est-ce que ce projet verra le jour ?
Normalement, nous allons tourner cet été. Nous allons aller à la rencontre des Français. On travaille avec les 70 000 facteurs de France. C'est un projet qui est en route en ce moment.
Si le temps d’un moment ou d’une journée vous pouviez être quelqu'un ou quelque chose, ce serait qui ou quoi ?
J’aimerais bien me prendre pour quelqu’un de bien. C’est le graal absolu, et c’est ce que j’aimerais être tout simplement.
Je suis en train de préparer un film qui s'appelle « France ». C'est une histoire d'amour dans laquelle je vais aller à la rencontre des Français et je veux qu'on aille là-bas. Tout a été arrêté à cause du Covid. On voyage beaucoup moins à l'étranger donc on a comme projet de faire une grande tournée à travers la France.
Quand est-ce que ce projet verra le jour ?
Normalement, nous allons tourner cet été. Nous allons aller à la rencontre des Français. On travaille avec les 70 000 facteurs de France. C'est un projet qui est en route en ce moment.
Si le temps d’un moment ou d’une journée vous pouviez être quelqu'un ou quelque chose, ce serait qui ou quoi ?
J’aimerais bien me prendre pour quelqu’un de bien. C’est le graal absolu, et c’est ce que j’aimerais être tout simplement.