Grâce aux cinémas Les Nemours d’Annecy et à l’association Plan Large, nous avons rencontré Thomas Lilti dont le film Médecin de campagne est sorti le 23 mars sur les écrans.
Thomas Lilti, vous êtes médecin, cinéaste. Quel lien feriez-vous entre la médecine et le cinéma ?
Il y a une approche commune entre la médecine hospitalière et le cinéma, c’est le travail en équipe. C’est quelque chose qui m’a toujours plu, et dans la médecine et dans le cinéma.
En revanche, le travail solitaire du médecin tel que je le décris dans Médecin de campagne est particulièrement difficile. Ce sentiment de solitude que vivent les médecins libéraux est très difficile à appréhender.
Votre vision de la médecine est globale. On n’approche pas un malade, mais une personne. On peut faire un rapprochement avec votre travail de metteur en scène.
Vous avez effectué des lectures collectives du scénario avant le tournage ?
Oui. Ce n’est pas qu’un film sur la médecine, mais aussi sur la communauté ! ici un village à la campagne, mais ça aurait pu en être une autre, ailleurs, un quartier dans une grande ville…
J’avais envie de créer un groupe de personnes amenées à vivre ensemble et de voir comment on fait pour rendre la vie la plus agréable possible, la moins douloureuse et le médecin joue un rôle là-dedans, l’idée étant de prendre en charge non pas la personne mais le malade, la famille parfois sur plusieurs générations .
Pour rendre cette impression de cohésion, de liens harmonieux ou discordants, l’idée de travailler en équipe avant, de se retrouver pour des lectures collectives, même les tout petits rôles, a beaucoup apporté de cohésion sur le tournage.
C’est votre 2° film qui traite de la médecine. Est-ce votre parcours personnel qui vous pousse à traiter ce sujet ?
L’envie de rendre hommage à la pratique médicale est au cœur de ce film. Mes remplacements de 27 à 32 ans à la campagne m’ont enrichi, transformé grâce à la relation au médecin que je remplaçais et aux relations avec les patients.
J’ai connu tous les profils de patients que montre le film, jeune handicapé, personne âgée, jeune fille malmenée par son compagnon…le vieillard qui ne veut pas être hospitalisé.
C’est aussi un film politique. Vous proposez une vision de la société, un débat sur les maisons de santé, sur le fait de pouvoir mourir chez soi, vous montrez les défauts de l’administration…
Est-ce que vous regrettez une société qui se délite ?
Non, il n’y a pas de regret. Le film n’est pas passéiste, mais oui, il y a toujours une démarche politique quand j’écris un film et quand je le mets en scène. Ma motivation de départ est l’envie de traiter un sujet contemporain inscrit dans une réalité quotidienne qui nous concerne tous, moi le premier, la désertification médicale, le droit de mourir chez soi…à l’intérieur d’une fiction romanesque et même divertissante, pas forcément du rire pendant une heure et demie, mais avec du rire, de l’émotion, tout ce que le romanesque comporte de divertissement.
Je ne veux faire ni un documentaire, ni un film de pur divertissement, c’est ce mélange des deux qui m’intéresse. C’est ce qui donne ce que vous appelez un regard politique, que tout le monde peut avoir autour de la pratique de la médecine.
Vous avez su rendre beaux les gens que vous montrez.
Tant mieux car il ne s’agit pas de proposer un regard sociologique mais de susciter de l’émotion. Je présente un univers qui me touche et qui peut être lieu d’émotion. Le cinéma français est essentiellement citadin, fait par des citadins. On peut me dire que je porte un regard très positif sur ces gens de la campagne, à l’exception d’un ou deux, mais c’est ce qui me touche en eux.
Mais vos personnages sont aussi ambivalents, complexes. Le médecin, par exemple, se trompe sur le diagnostic de l’autisme…
Je l’espère, tous les personnages sont méritants mais ils ont en même temps leurs défauts de personnalité. On aimerait avoir Werner comme médecin, il est très empathique, dévoué, obstiné, il est dans l’abnégation, le sacerdoce, mais il a aussi plein de défauts, c’est un solitaire bourru, qui va bizuter sa remplaçante. Il a même ses limites en tant que médecin.
Thomas Lilti, vous êtes médecin, cinéaste. Quel lien feriez-vous entre la médecine et le cinéma ?
Il y a une approche commune entre la médecine hospitalière et le cinéma, c’est le travail en équipe. C’est quelque chose qui m’a toujours plu, et dans la médecine et dans le cinéma.
En revanche, le travail solitaire du médecin tel que je le décris dans Médecin de campagne est particulièrement difficile. Ce sentiment de solitude que vivent les médecins libéraux est très difficile à appréhender.
Votre vision de la médecine est globale. On n’approche pas un malade, mais une personne. On peut faire un rapprochement avec votre travail de metteur en scène.
Vous avez effectué des lectures collectives du scénario avant le tournage ?
Oui. Ce n’est pas qu’un film sur la médecine, mais aussi sur la communauté ! ici un village à la campagne, mais ça aurait pu en être une autre, ailleurs, un quartier dans une grande ville…
J’avais envie de créer un groupe de personnes amenées à vivre ensemble et de voir comment on fait pour rendre la vie la plus agréable possible, la moins douloureuse et le médecin joue un rôle là-dedans, l’idée étant de prendre en charge non pas la personne mais le malade, la famille parfois sur plusieurs générations .
Pour rendre cette impression de cohésion, de liens harmonieux ou discordants, l’idée de travailler en équipe avant, de se retrouver pour des lectures collectives, même les tout petits rôles, a beaucoup apporté de cohésion sur le tournage.
C’est votre 2° film qui traite de la médecine. Est-ce votre parcours personnel qui vous pousse à traiter ce sujet ?
L’envie de rendre hommage à la pratique médicale est au cœur de ce film. Mes remplacements de 27 à 32 ans à la campagne m’ont enrichi, transformé grâce à la relation au médecin que je remplaçais et aux relations avec les patients.
J’ai connu tous les profils de patients que montre le film, jeune handicapé, personne âgée, jeune fille malmenée par son compagnon…le vieillard qui ne veut pas être hospitalisé.
C’est aussi un film politique. Vous proposez une vision de la société, un débat sur les maisons de santé, sur le fait de pouvoir mourir chez soi, vous montrez les défauts de l’administration…
Est-ce que vous regrettez une société qui se délite ?
Non, il n’y a pas de regret. Le film n’est pas passéiste, mais oui, il y a toujours une démarche politique quand j’écris un film et quand je le mets en scène. Ma motivation de départ est l’envie de traiter un sujet contemporain inscrit dans une réalité quotidienne qui nous concerne tous, moi le premier, la désertification médicale, le droit de mourir chez soi…à l’intérieur d’une fiction romanesque et même divertissante, pas forcément du rire pendant une heure et demie, mais avec du rire, de l’émotion, tout ce que le romanesque comporte de divertissement.
Je ne veux faire ni un documentaire, ni un film de pur divertissement, c’est ce mélange des deux qui m’intéresse. C’est ce qui donne ce que vous appelez un regard politique, que tout le monde peut avoir autour de la pratique de la médecine.
Vous avez su rendre beaux les gens que vous montrez.
Tant mieux car il ne s’agit pas de proposer un regard sociologique mais de susciter de l’émotion. Je présente un univers qui me touche et qui peut être lieu d’émotion. Le cinéma français est essentiellement citadin, fait par des citadins. On peut me dire que je porte un regard très positif sur ces gens de la campagne, à l’exception d’un ou deux, mais c’est ce qui me touche en eux.
Mais vos personnages sont aussi ambivalents, complexes. Le médecin, par exemple, se trompe sur le diagnostic de l’autisme…
Je l’espère, tous les personnages sont méritants mais ils ont en même temps leurs défauts de personnalité. On aimerait avoir Werner comme médecin, il est très empathique, dévoué, obstiné, il est dans l’abnégation, le sacerdoce, mais il a aussi plein de défauts, c’est un solitaire bourru, qui va bizuter sa remplaçante. Il a même ses limites en tant que médecin.
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L’histoire que vous proposez est intéressante car elle montre une évolution progressive , une ouverture du personnage vers plus d’humanité encore au contact de sa remplaçante. C’est sans doute ce qui lui donne la volonté de guérir de sa propre maladie.
Effectivement. Le film ne se termine pas par une happy-end magique. La guérison est due à ce lien d’amitié, d’amour ou en tout cas d’amour commun pour la médecine. C’est le problème de Werner qui a fait une croix sur toute relation sentimentale sous le prétexte qu’elle aurait pu nuire à son travail, d’ailleurs sa remplaçante en est au même point et c’est la rencontre, l’estime qui naît entre eux qui leur redonne le goût de la vie.
Le choix de François Cluzet s’est rapidement imposé ?
Il me fallait un acteur populaire pour un rôle populaire. Il n’y en a pas des dizaines. On sent qu’il y a une révolte chez François Cluzet, une colère et en même temps un regard tendre, engagé sur le monde.
Il y a aussi chez lui une forme de retenue qui permet au spectateur de trouver sa place à ses côtés. Ni le film ni le jeu de François Cluzet ne sont démonstratifs.
Je suis très heureux de ce que vous dites. Ça tient à des partis pris de mise en scène mais aussi aux acteurs eux-mêmes. Notamment François, Marianne, c’est la même chose, avait la volonté d’un jeu très intérieur, d’un personnage en retenue. Il peut être très bien dans des rôles excessifs, mais il excelle dans la retenue, quand il joue de son regard, de son attitude il est incroyablement émouvant. C’est ce que je voulais.
Votre cadrage est un peu serré sur le personnage. Est-ce une façon de faire ressortir son isolement ?
Je cherche l’immersion, ce qui peut donner cet aspect de documentaire. La volonté d’être tout près de mes personnages, mais il y a quand même plus de plans larges que dans mon film précédent.
Ils servent juste à situer, l’aéroport, le camp de gens du voyage aperçu de la route, un bout de campagne. Et puis on découvre que ce coin de campagne totale, avec de « vraies gens » est tout proche de Paris.
C’est le travail tel que je le conçois. Je n’ai pas envie de filmer les paysages, mais les gens.
Je me suis dit :
Ensuite, la tentation est d’aller filmer en Savoie, dans le Vercors ou en Corse, mais je voulais faire le contraire, je ne voulais pas une campagne touristique mais un lieu non pittoresque, près d’une ville, ou des gens vivent.
Pourquoi aller voir Médecin de campagne ?
C’est un film profondément optimiste, émouvant, qui donne de l’espoir en des choses toutes simples, en nous, et puis il faut aller le voir pour les comédiens, tous les comédiens qui y ont participé.
Interrogé sur ses projets, Thomas Lilti nous annonce qu’il prépare une série pour Canal +.
A suivre…pour notre plaisir !
Effectivement. Le film ne se termine pas par une happy-end magique. La guérison est due à ce lien d’amitié, d’amour ou en tout cas d’amour commun pour la médecine. C’est le problème de Werner qui a fait une croix sur toute relation sentimentale sous le prétexte qu’elle aurait pu nuire à son travail, d’ailleurs sa remplaçante en est au même point et c’est la rencontre, l’estime qui naît entre eux qui leur redonne le goût de la vie.
Le choix de François Cluzet s’est rapidement imposé ?
Il me fallait un acteur populaire pour un rôle populaire. Il n’y en a pas des dizaines. On sent qu’il y a une révolte chez François Cluzet, une colère et en même temps un regard tendre, engagé sur le monde.
Il y a aussi chez lui une forme de retenue qui permet au spectateur de trouver sa place à ses côtés. Ni le film ni le jeu de François Cluzet ne sont démonstratifs.
Je suis très heureux de ce que vous dites. Ça tient à des partis pris de mise en scène mais aussi aux acteurs eux-mêmes. Notamment François, Marianne, c’est la même chose, avait la volonté d’un jeu très intérieur, d’un personnage en retenue. Il peut être très bien dans des rôles excessifs, mais il excelle dans la retenue, quand il joue de son regard, de son attitude il est incroyablement émouvant. C’est ce que je voulais.
Votre cadrage est un peu serré sur le personnage. Est-ce une façon de faire ressortir son isolement ?
Je cherche l’immersion, ce qui peut donner cet aspect de documentaire. La volonté d’être tout près de mes personnages, mais il y a quand même plus de plans larges que dans mon film précédent.
Ils servent juste à situer, l’aéroport, le camp de gens du voyage aperçu de la route, un bout de campagne. Et puis on découvre que ce coin de campagne totale, avec de « vraies gens » est tout proche de Paris.
C’est le travail tel que je le conçois. Je n’ai pas envie de filmer les paysages, mais les gens.
Je me suis dit :
Il ne faut pas que je filme la campagne mais les gens qui vivent à la campagne, qui va exister à travers eux d’une manière ou d’une autre.
Ensuite, la tentation est d’aller filmer en Savoie, dans le Vercors ou en Corse, mais je voulais faire le contraire, je ne voulais pas une campagne touristique mais un lieu non pittoresque, près d’une ville, ou des gens vivent.
Pourquoi aller voir Médecin de campagne ?
C’est un film profondément optimiste, émouvant, qui donne de l’espoir en des choses toutes simples, en nous, et puis il faut aller le voir pour les comédiens, tous les comédiens qui y ont participé.
Interrogé sur ses projets, Thomas Lilti nous annonce qu’il prépare une série pour Canal +.
A suivre…pour notre plaisir !