Robert Lepage, vous ouvrez début octobre la saison de Bonlieu Scène Nationale, à Annecy, avec votre spectacle 8.8.7. D’ailleurs faut-il dire pièce ou spectacle ?
On peut dire spectacle aussi. Ce terme convient, bien que ce soit du théâtre.
Le titre 8.8.7 correspond au numéro de la maison que vous habitiez dans votre enfance, mais sans indication de rue ou de quartier, il sonne comme un code secret, un sésame pour revivre votre passé.
(Grand rire de Robert Lepage). Un peu, oui. D’ailleurs je ne dis pas Huit cent quatre-vingt-sept mais 8.8.7. C’est ce que je disais quand j’étais petit, « J’habite au 8.8.7 ». Il y a un côté un peu naïf et puis ça fait un peu penser à Huit et demi de Federico Fellini. On ne sait pas trop ce que ça veut dire et quand on voit le film on se dit « Ah, bon, il est en plein milieu du tournage de son neuvième film ». Ce n’est pas la même chose que Fellini, mais 8.8.7 est un retour en arrière, un travail sur la mémoire. La mémoire lointaine est beaucoup plus persistante que la mémoire à court terme. Je me suis toujours demandé comment il se fait que je me souviens si bien de ma première adresse et de mon premier numéro de téléphone quand j’étais tout petit, qui sont à jamais tatoués dans mon cerveau et pourquoi je n’arrive pas à me souvenir de mon numéro de téléphone actuel, des noms de certains collaborateurs. Il y a sûrement une raison au fait que la mémoire lointaine est si persistante. Est-ce parce qu’on a le droit de savoir ce qui est essentiel dans la vie les dix premières années et le reste n’est que de la dentelle ? J’ai voulu faire ce spectacle pour comprendre pourquoi on se souvient de tant de choses totalement inutiles…
Il faut croire que non puisque vous les utilisez, toutes ces choses.
Maintenant oui, parce que je suis un artiste et que j’y recours pour faire du théâtre, mais en règle générale les gens oublient leur premier numéro de téléphone. En fait, au départ mon intérêt vient de cet aspect clinique. Dans le spectacle, je me concentre sur mes souvenirs les plus clairs, les tout débuts de ma mémoire.
Vous évoquez un aspect clinique. Le passé nous imprègne tous. Pour certains il est un poids, pour d’autres il entraîne une psychanalyse, des thérapies et les artistes en font quelque chose de positif. Ils se construisent en reconstruisant leur passé. Comment devient-on artiste ?
C’est une attitude qu’on découvre avec le temps. Je n’ai jamais eu vraiment l’intention de devenir un artiste. Je me suis retrouvé un peu forcé à faire de l’art quand j’étais à l’école secondaire. Ce que j’aimais beaucoup dans le théâtre, c’est qu’on pouvait s’exprimer en se cachant derrière les autres ; c’est une forme d’art collective.
Plus on se montre, plus on se cache ?
C’est un paradoxe. Je suis trop timide pour faire du théâtre. Je me suis toujours réfugié derrière le groupe et je me suis retrouvé tout à coup à faire du spectacle solo. Ça m’expose (rire).
Les choses se font d’elles-mêmes ?
Oui, c’est ça. J’imagine qu’on a en soi une sorte d’impulsion qui nous oblige à corriger nos défauts, à affronter nos démons… Je suis quelqu’un d’assez timide et voilà que je me raconte.
De vos films émerge une impression de légèreté et de voyage. Voyage de l’intime à l’espace, de l’intérieur à l’extérieur, du conscient à l’inconscient, à travers le temps sans que les transitions soient visibles pour le spectateur. Tout est très « léger ».
C’est un peu inconscient chez moi. Ce que je cherche avant tout, c’est un sentiment de liberté et pour la trouver il faut se contraindre dans une structure, dans une forme. Il y a un récit, une structure dramaturgique mais il faut que le résultat soit très très libre, que le spectateur puisse se sentir intelligent et qu’il puisse choisir…
Rassurez-vous, c’est le cas. Quand on voit vos œuvres on se sent intelligent et léger, avec, tout le long, une impression de voyage.
Quand j’étais plus jeune, ma passion était la géographie. Mon désir était de voyager, ce que je fais maintenant à travers mes tournées. Aujourd’hui les voyages sont plus faciles, mais autrefois, à partir de Québec, il fallait voyager dans sa tête.
Êtes-vous conscient que vous êtes un véritable ambassadeur du Québec, comme me l’a dit une jeune femme québécoise que j’ai rencontrée il y a quelques jours ?
Les artistes sont des ambassadeurs et le Québec est encore à faire connaître. Les Québécois n’ont pas tout votre bagage, à vous les Français. Nous sommes très libres grâce à cela. Notre culture est particulière, francophone mais complètement américaine.
Vous représentez très bien, paraît-il, l’esprit québécois dans sa manière de parler de soi.
Oui, mais le sujet du spectacle que vous allez voir à Annecy traite d’un sujet beaucoup plus large que ma petite personne. Il y est question de toute une époque, de tout un mouvement politique, d’une lutte de classes, ça parle du Québec en général mais c’est raconté à travers une histoire avec un petit h, qui est mon histoire personnelle. La meilleure façon de parler des grands thèmes est de passer par la petite histoire.
En parlant de vous, vous êtes en relation avec l’ensemble du monde.
Sans prétention. Un artiste doit parler de ce qu’il connaît, alors son travail a plus de chances de devenir universel. Aujourd’hui les artistes sont plus préoccupés par l’internationalisme, tout le monde veut être connu partout dans le monde, on nivelle par la base certains propos, on tourne en anglais parce que c’est la langue universelle ; mais plus on parle de ce qu’on connaît, plus il y a de chances de toucher les gens.
On touche à l’humaine condition.
Voilà. C’est pourquoi à Cannes un film iranien va bouleverser tout le monde et remporter la palme, alors que les Iraniens vivent dans un univers très différent du nôtre, avec une grille morale tout autre, mais ce sont des êtres humains qui vivent des relations de famille… ça nous fascine, on se reconnaît, on se projette bien que les cultures et les contextes socio-politiques soient radicalement différents. C’est pourquoi l’artiste doit avoir une certaine humilité et parler de ce qu’il connaît.
En parlant de soi, on dépasse aussi, d’une certaine façon les codes, les langues…
Les gens qui ne comprennent pas nécessairement le langage au premier niveau vont le comprendre à un autre niveau. Ce sont ces autres niveaux qui sont intéressants.
Vous dites que le théâtre est le lieu d’une transformation dont les spectateurs sont les témoins. Dans 8.8.7, de quelle transformation s’agit-il ?
Il y en a plusieurs, mais la principale est une prise de conscience de mon personnage qui, en fait, est moi-même. Le héros de l’histoire accepte de faire quelque chose pour de mauvaises raisons et, au moment où il s’en rend compte, trouve en lui la force de changer, de devenir conscient. Il arrive qu’on fasse une chose pour des raisons nobles, patriotiques, mais on se rend compte que la véritable raison est de vouloir étonner la galerie, les médias…Il est important de s’en rendre compte et de faire son acte de contrition.
La notion de mensonge est très importante chez vous.
Oui, mais il ne s’agit pas du mensonge prémédité. Celui qui m’intéresse, c’est le mensonge de la mémoire. Dans mon spectacle, je raconte plein de mensonges parce que je ne me souviens pas très bien de tout. Nos souvenirs sont les souvenirs d’un souvenir d’un souvenir. C’est complètement mensonger mais à un moment donné ça n’a aucune importance. Parfois le mensonge aide à mieux exprimer la vérité. Picasso dit que l’art est un mensonge qui exprime la vérité.
Par vos spectacles vous vous construisez et reconstruisez en permanence ?
Absolument, et c’est pour cette raison que ce n’est pas écrit. C’est la représentation sur scène qui est une forme d’écriture.
Même dans 8.8.7, qui nécessite toute une installation technique, vous arrivez à garder une part de liberté et d’improvisation ?
Absolument. Il le faut. Actuellement, je joue le spectacle en anglais bien qu’il reste des passages en français. Quand on traduit, on trahit forcément, mais ces trahisons sont révélatrices, créatrices de sens qui enrichissent le spectacle. Prochainement je vais le jouer en italien. Et quand je reviens au français, je ne peux pas faire abstraction de ce que j’ai découvert, qui modifie et enrichit le spectacle.
Au fond, c’est vous qui devriez payer les spectateurs qui vous permettent de faire votre propre thérapie.
(Rires). Le One man show permet d’éviter bien des visites chez les psy, mais je ne suis pas obsédé par moi-même… Le danger existe effectivement de tomber dans les jérémiades de quelqu’un qui est en recherche d’identité. Le travail en équipe permet d’éviter ce piège.
Vous touchez à tout ce qui se passe sur scène, théâtre, opéra, danse, cirque, vous faites du one man show ou mettez en scène Shakespeare, vous réalisez des films…
Je trouve important d’avoir un projet dans toutes ces disciplines parce qu’elles s’informent l’une l’autre. Il arrive que le théâtre, par exemple, perde sa théâtralité et parfois le cirque ou l’opéra sont beaucoup plus théâtraux que le théâtre lui-même. Quand je trouve le temps de faire un film, j’utilise ce que j’ai appris des autres disciplines qui s’interrogent l’une l’autre et forment un cosmos. C’est important. On trouve souvent la solution d’un problème dans un autre projet.
Pour résumer ce que vous êtes et ce que vous faites, on pourrait dire que vous êtes un homme sans frontières, ni géographiques, ni techniques, ni linguistiques….
C’est inconscient mais je m’en rends compte quand j’arrive à une frontière, qu’il faut remplir un visa et qu’on me demande mon occupation. Je ne sais jamais quoi répondre, je peux dire acteur, metteur en scène, réalisateur.
Robert Lepage serait peut-être la meilleure réponse possible ?
Oui, mais les douaniers ne s’en satisferaient pas.
Le travail de la mémoire sur la mémoire ne serait-il pas celui de la vie ?
La démarche de Robert Lepage est totale, au sens où elle dépasse le langage parlé, les frontières de toutes sortes, les différentes disciplines. Elle est un voyage permanent pour trouver son propre langage, l’inventer et le partager et le réinventer en le partageant.
Heureux qui comme Lepage fera un beau voyage… à Bonlieu Scène Nationale, du 3 au 7 octobre 2015.
Toutes les infos sur le spectacles de Robert Lepage sur le site de Bonlieu Scène Nationale.
On peut dire spectacle aussi. Ce terme convient, bien que ce soit du théâtre.
Le titre 8.8.7 correspond au numéro de la maison que vous habitiez dans votre enfance, mais sans indication de rue ou de quartier, il sonne comme un code secret, un sésame pour revivre votre passé.
(Grand rire de Robert Lepage). Un peu, oui. D’ailleurs je ne dis pas Huit cent quatre-vingt-sept mais 8.8.7. C’est ce que je disais quand j’étais petit, « J’habite au 8.8.7 ». Il y a un côté un peu naïf et puis ça fait un peu penser à Huit et demi de Federico Fellini. On ne sait pas trop ce que ça veut dire et quand on voit le film on se dit « Ah, bon, il est en plein milieu du tournage de son neuvième film ». Ce n’est pas la même chose que Fellini, mais 8.8.7 est un retour en arrière, un travail sur la mémoire. La mémoire lointaine est beaucoup plus persistante que la mémoire à court terme. Je me suis toujours demandé comment il se fait que je me souviens si bien de ma première adresse et de mon premier numéro de téléphone quand j’étais tout petit, qui sont à jamais tatoués dans mon cerveau et pourquoi je n’arrive pas à me souvenir de mon numéro de téléphone actuel, des noms de certains collaborateurs. Il y a sûrement une raison au fait que la mémoire lointaine est si persistante. Est-ce parce qu’on a le droit de savoir ce qui est essentiel dans la vie les dix premières années et le reste n’est que de la dentelle ? J’ai voulu faire ce spectacle pour comprendre pourquoi on se souvient de tant de choses totalement inutiles…
Il faut croire que non puisque vous les utilisez, toutes ces choses.
Maintenant oui, parce que je suis un artiste et que j’y recours pour faire du théâtre, mais en règle générale les gens oublient leur premier numéro de téléphone. En fait, au départ mon intérêt vient de cet aspect clinique. Dans le spectacle, je me concentre sur mes souvenirs les plus clairs, les tout débuts de ma mémoire.
Vous évoquez un aspect clinique. Le passé nous imprègne tous. Pour certains il est un poids, pour d’autres il entraîne une psychanalyse, des thérapies et les artistes en font quelque chose de positif. Ils se construisent en reconstruisant leur passé. Comment devient-on artiste ?
C’est une attitude qu’on découvre avec le temps. Je n’ai jamais eu vraiment l’intention de devenir un artiste. Je me suis retrouvé un peu forcé à faire de l’art quand j’étais à l’école secondaire. Ce que j’aimais beaucoup dans le théâtre, c’est qu’on pouvait s’exprimer en se cachant derrière les autres ; c’est une forme d’art collective.
Plus on se montre, plus on se cache ?
C’est un paradoxe. Je suis trop timide pour faire du théâtre. Je me suis toujours réfugié derrière le groupe et je me suis retrouvé tout à coup à faire du spectacle solo. Ça m’expose (rire).
Les choses se font d’elles-mêmes ?
Oui, c’est ça. J’imagine qu’on a en soi une sorte d’impulsion qui nous oblige à corriger nos défauts, à affronter nos démons… Je suis quelqu’un d’assez timide et voilà que je me raconte.
De vos films émerge une impression de légèreté et de voyage. Voyage de l’intime à l’espace, de l’intérieur à l’extérieur, du conscient à l’inconscient, à travers le temps sans que les transitions soient visibles pour le spectateur. Tout est très « léger ».
C’est un peu inconscient chez moi. Ce que je cherche avant tout, c’est un sentiment de liberté et pour la trouver il faut se contraindre dans une structure, dans une forme. Il y a un récit, une structure dramaturgique mais il faut que le résultat soit très très libre, que le spectateur puisse se sentir intelligent et qu’il puisse choisir…
Rassurez-vous, c’est le cas. Quand on voit vos œuvres on se sent intelligent et léger, avec, tout le long, une impression de voyage.
Quand j’étais plus jeune, ma passion était la géographie. Mon désir était de voyager, ce que je fais maintenant à travers mes tournées. Aujourd’hui les voyages sont plus faciles, mais autrefois, à partir de Québec, il fallait voyager dans sa tête.
Êtes-vous conscient que vous êtes un véritable ambassadeur du Québec, comme me l’a dit une jeune femme québécoise que j’ai rencontrée il y a quelques jours ?
Les artistes sont des ambassadeurs et le Québec est encore à faire connaître. Les Québécois n’ont pas tout votre bagage, à vous les Français. Nous sommes très libres grâce à cela. Notre culture est particulière, francophone mais complètement américaine.
Vous représentez très bien, paraît-il, l’esprit québécois dans sa manière de parler de soi.
Oui, mais le sujet du spectacle que vous allez voir à Annecy traite d’un sujet beaucoup plus large que ma petite personne. Il y est question de toute une époque, de tout un mouvement politique, d’une lutte de classes, ça parle du Québec en général mais c’est raconté à travers une histoire avec un petit h, qui est mon histoire personnelle. La meilleure façon de parler des grands thèmes est de passer par la petite histoire.
En parlant de vous, vous êtes en relation avec l’ensemble du monde.
Sans prétention. Un artiste doit parler de ce qu’il connaît, alors son travail a plus de chances de devenir universel. Aujourd’hui les artistes sont plus préoccupés par l’internationalisme, tout le monde veut être connu partout dans le monde, on nivelle par la base certains propos, on tourne en anglais parce que c’est la langue universelle ; mais plus on parle de ce qu’on connaît, plus il y a de chances de toucher les gens.
On touche à l’humaine condition.
Voilà. C’est pourquoi à Cannes un film iranien va bouleverser tout le monde et remporter la palme, alors que les Iraniens vivent dans un univers très différent du nôtre, avec une grille morale tout autre, mais ce sont des êtres humains qui vivent des relations de famille… ça nous fascine, on se reconnaît, on se projette bien que les cultures et les contextes socio-politiques soient radicalement différents. C’est pourquoi l’artiste doit avoir une certaine humilité et parler de ce qu’il connaît.
En parlant de soi, on dépasse aussi, d’une certaine façon les codes, les langues…
Les gens qui ne comprennent pas nécessairement le langage au premier niveau vont le comprendre à un autre niveau. Ce sont ces autres niveaux qui sont intéressants.
Vous dites que le théâtre est le lieu d’une transformation dont les spectateurs sont les témoins. Dans 8.8.7, de quelle transformation s’agit-il ?
Il y en a plusieurs, mais la principale est une prise de conscience de mon personnage qui, en fait, est moi-même. Le héros de l’histoire accepte de faire quelque chose pour de mauvaises raisons et, au moment où il s’en rend compte, trouve en lui la force de changer, de devenir conscient. Il arrive qu’on fasse une chose pour des raisons nobles, patriotiques, mais on se rend compte que la véritable raison est de vouloir étonner la galerie, les médias…Il est important de s’en rendre compte et de faire son acte de contrition.
La notion de mensonge est très importante chez vous.
Oui, mais il ne s’agit pas du mensonge prémédité. Celui qui m’intéresse, c’est le mensonge de la mémoire. Dans mon spectacle, je raconte plein de mensonges parce que je ne me souviens pas très bien de tout. Nos souvenirs sont les souvenirs d’un souvenir d’un souvenir. C’est complètement mensonger mais à un moment donné ça n’a aucune importance. Parfois le mensonge aide à mieux exprimer la vérité. Picasso dit que l’art est un mensonge qui exprime la vérité.
Par vos spectacles vous vous construisez et reconstruisez en permanence ?
Absolument, et c’est pour cette raison que ce n’est pas écrit. C’est la représentation sur scène qui est une forme d’écriture.
Même dans 8.8.7, qui nécessite toute une installation technique, vous arrivez à garder une part de liberté et d’improvisation ?
Absolument. Il le faut. Actuellement, je joue le spectacle en anglais bien qu’il reste des passages en français. Quand on traduit, on trahit forcément, mais ces trahisons sont révélatrices, créatrices de sens qui enrichissent le spectacle. Prochainement je vais le jouer en italien. Et quand je reviens au français, je ne peux pas faire abstraction de ce que j’ai découvert, qui modifie et enrichit le spectacle.
Au fond, c’est vous qui devriez payer les spectateurs qui vous permettent de faire votre propre thérapie.
(Rires). Le One man show permet d’éviter bien des visites chez les psy, mais je ne suis pas obsédé par moi-même… Le danger existe effectivement de tomber dans les jérémiades de quelqu’un qui est en recherche d’identité. Le travail en équipe permet d’éviter ce piège.
Vous touchez à tout ce qui se passe sur scène, théâtre, opéra, danse, cirque, vous faites du one man show ou mettez en scène Shakespeare, vous réalisez des films…
Je trouve important d’avoir un projet dans toutes ces disciplines parce qu’elles s’informent l’une l’autre. Il arrive que le théâtre, par exemple, perde sa théâtralité et parfois le cirque ou l’opéra sont beaucoup plus théâtraux que le théâtre lui-même. Quand je trouve le temps de faire un film, j’utilise ce que j’ai appris des autres disciplines qui s’interrogent l’une l’autre et forment un cosmos. C’est important. On trouve souvent la solution d’un problème dans un autre projet.
Pour résumer ce que vous êtes et ce que vous faites, on pourrait dire que vous êtes un homme sans frontières, ni géographiques, ni techniques, ni linguistiques….
C’est inconscient mais je m’en rends compte quand j’arrive à une frontière, qu’il faut remplir un visa et qu’on me demande mon occupation. Je ne sais jamais quoi répondre, je peux dire acteur, metteur en scène, réalisateur.
Robert Lepage serait peut-être la meilleure réponse possible ?
Oui, mais les douaniers ne s’en satisferaient pas.
Le travail de la mémoire sur la mémoire ne serait-il pas celui de la vie ?
La démarche de Robert Lepage est totale, au sens où elle dépasse le langage parlé, les frontières de toutes sortes, les différentes disciplines. Elle est un voyage permanent pour trouver son propre langage, l’inventer et le partager et le réinventer en le partageant.
Heureux qui comme Lepage fera un beau voyage… à Bonlieu Scène Nationale, du 3 au 7 octobre 2015.
Toutes les infos sur le spectacles de Robert Lepage sur le site de Bonlieu Scène Nationale.